dimanche 19 septembre 2021

corrigé d'une dissertation: Respecter la nature, est-ce renoncer à la transformer ?

 La pollution, le réchauffement climatiques, les ouragans inquiètent. L’injonction de respecter le nature qui en découle est de plus en plus fréquente. Elle semble impliquer de ne rien faire à la nature. Autrement dit, respecter la nature semble revenir à renoncer à la transformer c’est-à-dire à ne plus rien faire pour la modifier.

Toutefois, de même qu’un chirurgien respecte son malade en l’opérant donc en le transformant, l’homme ne doit-il pas continuer à transformer la nature pour la respecter, d’abord parce que renoncer à la transformer, ce serait finalement pour lui, renoncer à être.

On peut donc se demander s’il y a  des conditions qui rendent possible  qu’on respecte la nature sans renoncer à la transformer.

 

 

L’homme transforme la nature en la dominant, c’est-à-dire qu’il modifie ce qui existe de soi-même indépendamment de lui pour le faire servir à ses propres intérêts.  C’est grâce à la connaissance qu’elle repose sur l’expérience acquise ou  sur la recherche des lois de la nature que cette domination est possible. Dès lors, la transformer revient àne pas la respecter, c’est-à-dire à la traiter comme un simple moyen pour ses propres fins. En effet, respecter, c’est traiter l’autre non pas comme une simple propriété, mais en le laissant être. Respecter la nature, c’est la laisse être pour elle-même comme le fait le peintre ou le poète qui invoque la nature. Pour la respecter, il faut renoncer à la transformer.

En effet, l’homme impose à la nature les formes qui lui paraissent utiles à lui sans se préoccuper de son existence à elle. Ainsi, couper un arbre pour en faire une pirogue ou brûler une partie de la forêt pour faire un champ, c’est transformer la nature sans la laisser être et se développer par elle-même. Et ces transformations la modifient inexorablement comme le montre Lévi-Strauss dans Tristes tropiques.

 

Toutefois, si la transformation de la nature comme domination implique de ne pas la respecter, transformer la nature peut être plutôt une façon de conserver quelque chose et ainsi, rendre peut-être possible un certain respect.

 

 

En effet, comme le signifie l’étymologie du terme culture qui vient du latin « cultura » qui signifie prendre soin (cf. Hannah Arendt, La crise de la culture), on peut transformer une chose pour elle-même. Ainsi peut-on transformer la nature en en prenant soin. Nombre de paysages qui nous paraissent naturels sont l’effet d’un long processus de transformation de la nature qui, si elle n’est plus vierge, n’est pas défigurée comme dans la moderne agriculture industrielle qui réduit les animaux à l’état de machines à produire et leur ôte toute spontanéité comme le dénonce Hans Jonas dans Le principe responsabilité.

Aussi on peut respecter la nature en la transformant en prenant soin d’elle, c’est-à-dire en veillant à ce qu’elle puisse se déployer d’elle-même, notamment en transformant les transformations négatives que l’homme lui a fait souffrir, parfois sans vraiment savoir ce qu’il faisait.

 

Cependant, transformer en prenant soin d’une partie de la nature, peut avoir des effets à long termes dévastateurs pour la nature comme tout. Dès lors, comment transformer la nature peut-il être compatible avec son respect ?

 

 

Par nature, on peut entendre comme François Dagognet (1924-2015) dans La maîtrise du vivant, un équilibre, soit qu’on le conçoive comme provenant de Dieu, soit comme le résultat d’une évolution qui enveloppe d’ailleurs l’action des hommes. Ainsi le paysage qui paraît naturel et qui est bien le fruit d’un mouvement de la nature et aussi des interventions répétées et non concertées des hommes (cf. Lévi-Strauss) manifeste un équilibre qui constitue le cadre naturel de l’existence des hommes qu’ils peuvent maintenir par des actions de transformations qui visent à le conserver en éliminant les résultats d’actions destructrices. En effet, une pure nature est impossible car l’homme se condamnerait à ne plus vivre. Or, il y a du naturel dans son apparition. Autrement dit, l’homme lui-même est une partie de la nature. Il doit donc transformer ce qui existe hors de lui pour pouvoir vivre. Et son action transformatrice est naturelle dans la mesure où il l’est.

Pour respecter la nature, il faut connaître les équilibres, non pour dominer la nature, mais pour agir en vue de sa préservation.

La nature comme équilibre est ce qui rend possible une vie digne pour tous. Ainsi maintenir la nature, c’est la condition de tout respect. En respectant ce qui lui permet de vivre, l’homme se respecte lui-même. Et ainsi, les transformations de la nature qu’il opère implique son respect. Reconstituer des forêts, c’est retrouver un certain équilibre qui constitue la nature.

 

 

Disons donc pour conclure que le problème était de savoir s’ il y a des conditions qui permettent de respecter la nature tout en la transformant. Or, si cette transformation est une domination, le respect est impossible. Par contre, si la transformation consiste à prendre soin, alors c’est respecter la nature que de la transformer pour qu’elle se conserve comme équilibre, c’est-à-dire comme condition du respect de l’homme, partie de la nature.

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