L’édition utilisée est :
Montesquieu,
Lettres persanes, présentation par
Laurent Versini, dossier par Laurence Macé, GF Flammarion n°1482, 1995, 2016.
Charles-Louis
de Secondat, futur baron de La
Brède et de Montesquieu, connu sous le nom de Montesquieu, naît
le 18 janvier 1689 au château de La
Brède (Guyenne, à côté de Bordeaux). Il est le fils de
Jacques de Secondat (1654-1713), et de Marie-Françoise de Pesnel (1669-1720), baronne
de La Brède. Il appartient à une famille de magistrats qui a acquis la noblesse
par l’épée durant la guerre de cent ans. Il a pour oncle, Jean-Baptiste de
Secondat, l’aîné, écuyer, baron de Montesquieu, seigneur de Castelnouvel,
Talence et Raymond, président à mortier au Parlement de Bordeaux ( ?-1716).
Ses parents lui choisissent pour parrain, Charles, un mendiant, afin qu’il se
souvienne toute sa vie que les pauvres sont ses frères.
Le 16 octobre
1696, sa mère meurt après avoir mis au monde une fille.
De 1700 à
1705, il fait ses humanités chez les oratoriens au collète de Juilly (dans
l’actuelle Seine-et-Marne à une trentaine de kilomètres de Paris). Il étudie la
philosophie au collège d’Harcourt (actuellement Saint-Louis) à Paris.
De 1705 à
1708, il étudie le droit à Bordeaux.
Le 26 février
1708, Louis XIV rappelait aux curés l’obligation de renouveler, tous les trois
moi, la lecture de l’édit de février 1556 d’Henri II (1519-1547-1559) qui stipulait que les filles enceintes bien que non
mariées doivent avertir un officier ministériel de leur
« état » : « quoique
la licence et le dérèglement des mœurs qui ont fait de continuels progrès
depuis le temps de cet édit en rendent tous les jours la publication plus
nécessaire. » (cf. Lettres persanes, lettre CXX d’Usbek
à Rhédi). Le 29 juillet, Charles de Secondat est bachelier en droit. Le 12
août, il est licencié en droit et est reçu avocat au parlement de Bordeaux le
14.
De 1709 à
1713, il séjourne à Paris.
En 1710,
paraissent les Essais de Théodicée de
Leibniz (1746-1716). Montesquieu va les lire puisqu’il en discutera des thèses
dans les Lettres persanes (lettre LXIX sur la conciliation entre la
prescience divine et la liberté de l’homme et lettre LXXXIII sur la justice
divine et le mal). Il constitue un recueil de notes juridiques sur le droit
romain, la Collectio juris, qu’il
continuera jusqu’en 1721.
Le 17 avril
1711, Joseph 1er (1678-1705-1711),
empereur du saint empire romain germanique, meurt (cf. Lettres persanes, lettre
CXXX de Rica à ***, la lettre d’un nouvelliste, p.296).
En 1713, il
rencontre un chinois nommé Arcadio Hoange (1679-1716), converti au
catholicisme, qui a suivi des missionnaires jésuites. Le 13 septembre, le pape
Clément XI (1649-1700-1721) édite la
bulle Unigenitus ou Constitution (cf. Lettres persanes, lettre
XXIV) qui condamne 111 propositions du père Quesnel, ce qui revient à condamner
le jansénisme. Le 15 novembre, son père meurt. Il devient baron de la Brède.
Le 12 février
1714, Charles de Secondat achète une charge de conseiller du parlement de
Bordeaux. Le 15 novembre, son père meurt. Antoine Houdar de La Motte
(1672-1731), poète et académicien qui ignore le grec, met en alexandrins la
traduction de l’Iliade d’Anne Dacier
(1645-1720) de 1711. Il la réduit de moitié. Il fait précéder sa traduction
d’un Discours sur Homère où il remet
en cause l’existence du poète mais surtout critique ses défauts littéraires.
Madame Dacier réplique avec son ouvrage Des
Causes de la corruption du goût :
la seconde querelle des Anciens et des Modernes est lancée (cf. Lettres
persanes, lettre XXXVI ; lettre CXXVIII de Rica à Usbek, p.292 ;
cf. Cammagre Geneviève, « De l’avenir des Anciens. La polémique sur Homère
entre Mme Dacier et Houdar de La Motte », Littératures classiques 2/2010,
n° 72, p.145-156).
Le 30 avril
1715 à Bordeaux, il épouse Jeanne de Lartigue (1689-1770), une protestante de
l’Agenais et de Martillac, terres enclavées dans la baronnie de la Brède
(actuellement une commune de la Gironde). Elle est issue d’une riche famille et
de noblesse récente. Elle lui apporte l’importante dot de 100 000 livres. Il
s’installe rue Margaux (au 29) à Bordeaux. Le 1er septembre, le
vieux roi Louis XIV (1638-1715) meurt (cf. Lettres persanes, lettre XCII
d’Usbek à Rhédi : « Le monarque
qui a si longtemps régné n’est plus. »). Son arrière petit-fils lui
succède sous le nom de Louis XV (1710-1774) : le « jeune roi » (Lettres
persanes, lettre CVII de Rica à Ibben) a cinq ans. Le 4 septembre, le
Parlement de Paris casse son testament qui avait donné certains pouvoirs à ses
bâtards, notamment le duc du Maine (1670-1736). Philippe d’Orléans (1664-1723)
devient pleinement régent. En septembre, il met en place la polysynodie, un
système de conseil qui associe la noblesse organisé par domaines. Elle vise à
remplacer les secrétaires d’État du ministère à la façon de Louis XIV (cf. Lettres
persanes, lettre CXXXVIII de Rica à Ibben, p.316). En décembre,
Montesquieu adresse au régent un Mémoire
sur les dettes de l’État. C’est peut-être à cette époque qu’il rédige un Discours sur Cicéron. Dans la nouvelle
querelle des anciens et des modernes, Houdar de la Motte réplique à Madame
Dacier avec ses Réflexions sur la
critique.
Le 10 février
1716, naît à Martillac son fils Jean-Baptiste de Secondat (1716-1795). Jean
Baptiste de Secondat, son oncle, perd son fils unique. Il lègue à Charles-Louis
ses biens. Le 3 avril, il est élu à l’Académie de Bordeaux. Le 24 avril, son oncle,
Jean-Baptiste de Secondat meurt. Charles-Louis hérite d’une vraie fortune et de
la baronnie de Montesquieu, dont il prend le nom. En juin et août, le nouveau
Montesquieu lit à l’académie de Bordeaux une communication Sur la politique des romains dans la religion. Le 13 juillet, il
succède à la charge de président à mortier du parlement de Bordeaux. Le 28
septembre, Montesquieu fonde à l’Académie de Bordeaux un prix d’anatomie de 300
livres (un journalier gagne à cette époque 112 livres par an pour 250 jours de
travail).
Le 2 mai 1716,
un édit autorise l’écossais John Law (1671-1729) à créer la Banque générale
avec un capital de six millions de livres réparties en 1 200 actions
de 5 000 livres. La Banque rembourse les billets qu’elle émet en or
ou en argent sans tenir compte des cours changeants de sorte que les billets
acquièrent une valeur supérieure. Le 14 mai, le régent crée une chambre de
justice pour enquêter sur les malversations des financiers (cf. Lettres
persanes, lettre XCVIII d’Usbek à Ibben). Durant l’hiver 1716/1717, il
séjourne à Paris.
Le 22 janvier
1717 naît sa fille Marie-Catherine de Secondat (1717-1784). Le 10 avril 1717,
un nouvel édit élargit les privilèges de la banque créée par Law : les
billets qu’elle émet, convertibles à vue, peuvent être reçus en paiement des
impôts. Le 23 août, Law obtient la rétrocession des privilèges de la Compagnie
de la Louisiane. Le 6 septembre, Law crée la Compagnie d’Occident, pour les
colonies françaises d’Amérique et du Sénégal, surnommée la Compagnie du
Mississippi. Il obtient alors le monopole commercial de la Louisiane pour
vingt-cinq ans, avec pour objectif de peupler la colonie de
6 000 blancs et de 3 000 noirs en dix ans, pour concurrencer
l’Espagne et l’Angleterre. Son capital s’élève à 100 millions de livres,
réparties en 200 000 actions payables en papier d’État, comportant
4 % de dividendes. C’est un succès : la Louisiane passe pour un pays
de cocagne, ce qui attire les capitaux, mais les colons guère nombreux au
départ le font surtout pour échapper aux galères. L’opération permet de régler
60 millions de livres de dette publique. Le 15 novembre, Montesquieu lit
une communication Sur la différence des
génies. L’Éloge de la sincérité
est non daté. C’est en 1717 au plus tôt qu’il se procure une édition datée de
cette année du roman épistolaire L’espion
turc (italien 1684 ; français 1686) de Giovani Paolo Marana (1642-1693)
qu’on a retrouvée dans sa bibliothèque. Il lit les Mémoires du cardinal de Retz (1613-1679), rédigées entre l’automne
1675 et le printemps 1677, qui viennent de sortir de façon posthume (cf. Lettres
persanes, lettre CXI d’Usbek à ***). Le Czar Pierre 1er
(1672-1725) dit Pierre le grand passe trois mois à Paris.
Durant l’hiver
1717/1718, il séjourne à nouveau à Paris.
En 1718, Montesquieu
fait des discours et des expériences scientifiques diverses à l’académie de
Bordeaux : le 1er mai : Sur les causes de l’écho ; le 29 juin : Sur le gui, sur la mousse des chênes, … ;
le 25 août : Sur les glandes rénales.
L’abbé de Saint-Pierre (1658-1743) publie la Polysynodie où il critique le despotisme de Louis XIV. Il est exclu
pour ce fait de l’Académie française. La polysynodie est supprimée par le
Régent le 24 septembre. Le 30 novembre le « fameux roi de Suède »
Charles XII (1682-1697-1718) meurt
(cf. Lettres
persanes, lettre CXXVII de Rica à Ibben). Le 4 décembre 1718, la Banque
générale de John Law devient Banque royale avec effet le 1er janvier
1719. Les billets de banque sont désormais garantis par l’État. Le 9 décembre,
l’ambassadeur d’Espagne, Antonio del Giudice, duc de Giovinazzo, prince de
Cellamare (1657-1733) est expulsé de France. Il complotait pour le compte de
son maître, le roi d’Espagne, Philippe V (1683-1746), petit-fils de Louis XIV,
qui songeait chasser le régent et devenir roi de France (cf. l’allusion dans
les Lettres
persanes, lettre CXXVI de Rica à Usbek). Le 27 décembre, l’Angleterre
déclare la guerre à l’Espagne.
Le 9 janvier
1719, la France déclare la guerre à l’Espagne. Toujours en janvier, le Nouveau Mercure publie son Projet d’une histoire physique de la terre
ancienne et de la terre moderne. Le 2 mars, le baron Henri de Görtz
(1668-1719), ancien favori et premier ministre de Charles XII de Suède, est
exécuté (cf. Lettres persanes, lettre CXXVII de Rica à Ibben, p.288). La Compagnie
du Mississipi de John Law reprend la Compagnie française des Indes orientales,
la Compagnie de Chine et d’autres sociétés commerciales rivales : elle
devient la Compagnie perpétuelle des Indes. John Law obtient en outre la ferme
du tabac et rachète la ferme des impôts indirects aux frères Paris. En juillet
1719, la Banque générale des Indes reçoit la Surintendance des monnaies,
c’est-à-dire le monopole d’émission en France. En octobre, enfin, elle reçoit
les recettes générales. Montesquieu quant à lui s’intéresse à l’histoire
naturelle. Son Essai d’observation sur
l’histoire naturelle est lu le 16 novembre.
En 1720, la Banque
générale et la Compagnie des Indes fusionnent. Le 5 janvier, John Law est nommé
contrôleur général des finances dans le but d’attirer les capitaux. Pour
empêcher la thésaurisation de l’or et de l’argent, Law interdit la possession
de plus de 500 livres de métaux précieux par foyer, sous peine de
confiscation et d’amende. Une récompense est promise aux dénonciateurs. Des
perquisitions ont lieu, même chez les ecclésiastiques. Le 11 mars, pour
décourager le public de la monnaie métallique, Law suspend la valeur
libératoire de l’or, à dater du 31 décembre. Les « semeurs de faux
bruits » sont déportés aux colonies, ce qui crée un scandale. Le 24 mars,
la rumeur d’une banqueroute est répandue par quelques initiés. Le 1er
mai 1720, Montesquieu donne : Sur
les causes de la pesanteur. Il achète après le 10 mai les Voyages en Perse (1686) de Jean Chardin (1643-1713)
au libraire bordelais Lacourt qui le note. En juillet, les prêts que consent la
Compagnie perpétuelle des Indes conduisent à des augmentations successives de
capital qui alimentent la spéculation. Paul Féval (1816-1887) la romancera dans
Le Bossu (1857). Elle tourne à la
baisse voire à l’émeute comme le 17 juillet où il y a 17 morts. Le 21 juillet,
une semi-banqueroute est décrétée. Le 25 août, il prononce : Sur la cause de la transparence des corps.
Il annonce pour la fin de l’année une Histoire
de la terre ancienne et moderne. Entre septembre et octobre, le système de
Law est liquidé (cf. Lettres persanes, lettre CXXXVIII de
Rica à Ibben, p.316). Le 10 octobre, les billets de la Banque générale n’ont
plus cours. Le 14 décembre, John Law s’enfuit après avoir été remplacé par Le
Peletier de La Houssaye deux jours plus tôt.
Le 19 mars
1721, le pape Clément XI meurt. En mai, Montesquieu publie anonymement à
Amsterdam les Lettres persanes (150 lettres) sans nom d’auteur chez un
éditeur, Pierre Marteau basé à Cologne, qui n’existe pas. On peut penser que
l’ouvrage a été imprimé chez Jacques Desbordes, à Amsterdam et/ou chez Jacques
Brunel supposé basé à Amsterdam mais imprimeur clandestin à Rouen. Une seconde édition revue, corrigée, diminuée et
augmentée par l’auteur paraît chez Pierre Marteau. Elle retranche treize
lettres de l’édition originale (les lettres I, V, XVI, XXV, XXXII, XLI, XLII,
XLIII, XLVII, LXV, LXX, LXXI de l’édition de 1758) et en ajoute trois (CXI,
CXXIV, CXLV de l’édition de 1758). L’ouvrage connaît un grand succès. Il
connaîtra une trentaine d’éditions jusqu’à la mort de son auteur. Il réside rue
du Mirail à Bordeaux. Il a peut-être fait un séjour à Paris en août. En
novembre, il lit à nouveau son Essai
d’observation sur l’histoire naturelle.
Le 7 août 1722
il part pour Paris. Il commence à fréquenter l’hôtel de Soubise. Peut-être
a-t-il fréquenté le club de l’Entresol (créé en 1720, il fonctionne comme un
club anglais : on y discutait de questions politiques et économiques). Il
est présenté à Mme de Lambert (1647-1733) par l’abbé de Saint-Pierre. Dans son
salon, il trouve dans les habitués, Fontenelle (1657-1757) et Houdar de la
Motte. On pouvait trouver dans ce salon : le jésuite et homme de lettre le
père Claude Buffier (1661-1737), l’homme de lettres, abbé de François-Timoléon
de Choisy (1644-1724), Mme Dacier, le mathématicien et astronome Jean-Jacques Dortous
de Mairan (1678-1771), l’historien, dit « le président Hénault »
(1685-1770), l’écrivain Marivaux (1688-1763), l’homme de lettres et abbé Nicolas-Hubert
Mongault (1674-1746), l’écrivain et favori de Madame Lambert Louis-Sylvestre de
Sacy (1654-1727), le poète et marquis de Sainte-Aulaire (1648-1742), l’écrivaine
Marguerite de Launay baronne Staal (1683-1750), la femme de lettres Madame de
Tencin (1682-1749) et mère du jeune d’Alembert (1717-1783), l’homme de lettres
et abbé Terrasson (1670-1750). Montesquieu fréquente les salons de l’épouse du
marquis Louis de Brancas (1672-1750), Catherine de Nyvenheim, un salon
politique. On le retrouve dans le salon de Marie, marquise du Deffant
(1697-1780), dans celui de Madame Geoffrin (1699-1777).
Le 25 octobre,
Louis XV est sacré roi. En novembre, Montesquieu rentre dans le bordelais.
Au mois de
janvier 1723, Montesquieu commence un séjour à Paris. Le 22 février, Louis XV
est déclaré majeur. Le 7 août, il quitte Paris. Le 10 août, le cardinal Guillaume
Dubois (1656-1723), principal ministre du régent, meurt. Le 18 novembre, il
donne : Lettre de Xénocrate à Phérès
et une Dissertation sur le mouvement. Le
2 décembre, Philippe d’Orléans meurt.
De mai à août
1724, il séjourne tour à tour à Paris, Versailles et au château de Baye chez Jean-Baptiste
Berthelot de Duchy (1672-1740), receveur général des finances de la généralité
de Paris. Le Temple de Cnide, poème
en prose qui se fait passer pour la traduction d’un auteur grec, paraît en
pré-originale dans la Bibliothèque
française.
De janvier à
février 1725, Montesquieu séjourne à Paris. En mars, Le Temple de Cnide paraît. Le 1er mai, il lit à Bordeaux
le Traité des devoirs. Il demeure
dorénavant à l’actuelle place des martyrs de la résistance. Le 25 août, il
donne De la considération et de la
réputation. Le 11 novembre, il fait un discours de rentrée au Parlement de
Bordeaux. Le 15 novembre, il prononce à l’Académie de Bordeaux Sur les motifs qui doivent nous encourager
dans les sciences. En décembre, il part séjourner à Paris.
Jusqu’à
mi-juin 1726, Montesquieu séjourne à Paris. Le 7 juillet, il vend l’usufruit de
sa charge de Président à Mortier pour payer ses dettes, ce qui préserve les
droits de ses héritiers sur celle-ci. Il obtient une rente de 5200 livres. Le
25 août, il fait l’éloge du duc de la Force (1675-1726), protecteur de
l’Académie de Bordeaux, qui venait de mourir le 21 juillet. Le 29 septembre, il
travaille au Dialogue de Sylla et
d’Eucrate. Le 28 décembre, il donne procuration à sa femme avant de partir
à Paris.
Le 23 février
1727 naît Denise de Montesquieu (1727-1800). Son père séjourne toute l’année à
Paris. Il se représente à l’Académie française pour succéder à Louis de Sacy.
Il déclare qu’il quittera la
France s’il n’est pas nommé. Ses adversaires lui opposent ses
Lettres
persanes. Il pare l’attaque en en faisant faire rapidement une édition expurgée
qu’il présente au cardinal de Fleury, ministre de Louis XV, en rejetant sur les éditeurs les fautes qu’on lui avait
reprochées. Le 20 décembre a lieu le premier scrutin d’élection à l’Académie
française qui est un échec.
Le 5 janvier
1728, Montesquieu est élu à l’Académie française contre le juriste et écrivain Mathieu
Marais (1664-1737) malgré l’opposition du parti religieux. Le cardinal de
Fleury s’est désintéressé de l’élection. Le 24 janvier, il est reçu par Jean-Roland
Mallet (1675-1736) puis prononce son discours de réception. Le 5 avril, il part
pour Vienne avec Lord James Waldegrave (1684-1741), premier du nom, ambassadeur
du roi d’Angleterre Georges II (1683-1727-1760),
et neveu du maréchal de Berwick (1670-1734), maréchal de France. Ils arrivent à
Vienne le 26. Le 20 mai, il est de la réception au château de Luxembourg. En
juin, il voyage en Hongrie. Il visite les mines de Chemnitz, Neu-Sohl et
Königsberg. Le 9 juillet, il quitte Vienne pour Gratz où il arrive quatre jours
après. Du 24 septembre au 16 octobre il séjourne à Milan. Le 18 octobre, il
visite les îles Borromées. Du 23 octobre au 5 novembre, il séjourne à Turin. Le
9 novembre, il arrive à Gênes. Du 21 au 22 novembre, il a une traversée
difficile de Gênes à la Spezzia. Le 1er décembre, il arrive à
Florence.
Du 19 janvier
au 18 avril 1729, il séjourne à Rome. Du 23 avril au 6 mai, il séjourne à
Naples. Puis il retourne à Rome pendant deux mois. Il quitte la cité du Pape le
4 juillet. Du 9 au 17 juillet il séjourne à Bologne. Le 3 août il arrive à
Munich après avoir passé par le Brenner et Innsbruck. Du 16 au 23 août, il
demeure malade à Augsbourg. Du 29 au 31 août il est à Francfort. Du 1er
au 15 septembre, il visite la Rhénanie, notamment ses villes. Il arrive le 24
septembre à Hanovre où il est présenté au roi d’Angleterre, Georges II,
originaire d’Hanovre. Début octobre, il visite les mines du Hartz en compagnie de
Jean-Frédéric, baron de Stain (1681-1735), ministre du duc de Brunswick. Le 15
octobre, Montesquieu arrive à Amsterdam. Le 31, il part de La Haye, traverse la
Manche sur le yacht de Lord Chesterfield (1694-1773) et arrive à Londres le 3
novembre.
Le 23 février
1730, Montesquieu écrit à Chauvelin pour obtenir un poste diplomatique. Il
assiste le même jour à une séance au Parlement. Il est élu à la Royal Society
le 9 mars. Le 10 avril, il assiste à une violente séance à Westminster sur le
port de Dunkerque. Le 23 mai il est initié à la Franc-maçonnerie
au sein de la loge londonienne Horn (le Cor) Tavern de Westminster. Le 5 octobre,
il est présenté à la reine Caroline de Brandebourg-Ansbach (1683-1737) à
Kensington Palace.
Le 6 avril
1731, Montesquieu assiste peut-être au succès de sa protégée Mlle Sallé à
Lincoln’s Inn Fields. Le 13 mai, il est de retour à la Brède. Le 25 août, il
donne une Description de deux fontaines
de Hongrie. Il compose : Mémoires
sur les mines, Réflexions sur la
monarchie universelle en Europe, Réflexions
sur le caractère de quelques princes et sur quelques événements de leur vie.
Il commence son livre sur les Romains. L’ouvrage de Germain-François Poullain
de Saint-Foix (1698-1776) paru l’année précédente, Lettres d’une Turque à Paris, écrites à sa sœur au serrail [sic],
accompagne une contrefaçon des Lettres persanes, sous le titre Lettres d’une Turque à Paris écrites à sa
sœur au Sérail pour servir de supplément aux Lettres Persannes [sic].
En 1732,
Crébillon fils (1707-1777) fait paraître un roman épistolaire, Lettres de la marquise de M*** au comte de R***. Le 15
novembre, il donne Sobriété des habitants
de Rome.
En mai 1733,
part pour Paris où il va séjourner. Le 12 juillet Madame de Lambert décède. Son
salon se déplace chez Madame de Tencin.
Le 20 juillet
1734, Montesquieu publie à Amsterdam les Considérations
sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence. Il commence
à fréquenter Madame de Tencin. Le 13 août, il est reçu à la Ferté-Vidame par le
duc de Saint Simon (1675-1755), mémorialiste du règne de Louis XIV (ses Mémoires ne paraîtront de façon complète
qu’au XIX° siècle). En septembre, il revient à Bordeaux. Montesquieu travaille
à Liberté politique, non publiée (qui
sera inclue dans ses Pensées). Il
fait paraître Réflexions sur la monarchie
universelle en Europe puis détruit tous les exemplaires sauf un. Peut-être
forme-t-il le projet de De l’esprit des
lois. Le 29 novembre, il donne Sur la
formation et le progrès des idées.
En 1735, George
Lyttelton (1709-1773) fait paraître en anglais et en français les Nouvelles Lettres persanes. Durant
l’été, Montesquieu séjourne à Chantilly (qui se situe dans l’actuel département
de l’Oise).
En 1736 il
donne l’Essai sur les causes qui peuvent
affecter les esprits et les caractères qui reprend la dissertation Sur la différence des génies. En septembre, il retourne à Bordeaux. Le 2
novembre, il achète pour son fils l’office de conseiller au parlement.
De janvier à
avril 1737, il séjourne à Bordeaux. Le 6 avril, à cause de son appartenance à
la franc-maçonnerie, Montesquieu est inquiété par l’intendant de Guyenne Claude
Boucher (1672-1752, intendant de 1720 à 1743) qui le dénonce au cardinal Fleury
(1653-1743). Il continue néanmoins à fréquenter les loges bordelaises et
parisiennes. De mai à décembre, Montesquieu séjourne à Paris.
De janvier à
octobre 1738, il séjourne à Paris. Il donne une Histoire de France non publiée. De novembre à décembre, il séjourne
à Paris. Le 19 novembre, Marie de Montesquieu épouse Joseph Vincent de
Guichaner d’Armajan (1707-1766), chevalier d’honneur, conseiller de la Cour des
Aides de Bordeaux. Sa dot est modeste : 10 000 livres (cf. François
Cadilhon, Jean-Baptiste de Secondat de
Montesquieu : au nom du père, Presses Universitaires de Bordeaux,
2008, p.14).
De janvier à
février 1739, il séjourne à Bordeaux, de mars à décembre à Paris.
De janvier à
mars 1740, il séjourne à Bordeaux, d’avril à décembre à Paris. Le 30 avril,
Jean-Baptiste de Secondat épouse Marie-Catherine Thérèse de Mons
(1720- ?), héritière d’une vieille famille de noblesse d’épée. Chaque
famille apporte 300 000 livres (cf. François Cadilhon, Jean-Baptiste de Secondat de Montesquieu :
au nom du père, Presses Universitaires de Bordeaux, 2008, p.14-15).
De janvier à
mars 1741, Montesquieu séjourne à Bordeaux. Paraît la traduction du roman
épistolaire de Samuel Richardson (1689-1761), Pamela, ou la vertu récompensée (Pamela, or Virtue rewarded), publié l’année précédente en
Angleterre. Il travaille huit heures par jour à son futur grand ouvrage De l’esprit des Lois. D’avril à
décembre, il séjourne à Paris.
Le 2 février
1742, dix-huit livres de De l’esprit des
lois sont achevés. En septembre, il commence la rédaction d’Arsace et Isménie, un « roman
oriental », à la demande de la légère, voire scandaleuse, Louise-Anne de
Bourbon-Condé, dite mademoiselle de Charolais (1695-1758).
De janvier à
août 1743, Montesquieu séjourne à Paris. Voltaire (1694-1778), dans une lettre
à Vauvenargues (1715-1747), parle d’une France « d’abord ivre » des Lettres persanes. De septembre à
décembre, Montesquieu séjourne à Bordeaux où il se livre à une révision
générale de De l’esprit des lois.
Il passe
l’année 1744 à Bordeaux.
Le 2 février
1745, il lit De l’esprit des lois
chez son ami bordelais Jean Barbot ( ?- ?), président de l’Académie
Royale des Belles-Lettres, Sciences et Arts de Bordeaux. Le 25 mars, Denise de
Montesquieu épouse son cousin Godefroy de Secondat (1702-1774) à Clairac.
Montesquieu donne une dote de 10 000 livres mais sa femme en ajoute
60 000 (cf. François Cadilhon, Jean-Baptiste
de Secondat de Montesquieu : au nom du père, Presses universitaires de
Bordeaux, 2008, p.16).
De janvier à
aout 1746, Montesquieu séjourne à Bordeaux. Il est élu à l’Académie des
sciences de Prusse que Leibniz avait fondée en 1700. Son président est depuis
l’année précédente le français Pierre Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759)
favorisé par Frédéric II de Prusse (1712-1740-1786). En septembre, Montesquieu
retourne à Paris. Il travaille à De
l’esprit des lois.
De janvier à
octobre 1747, Montesquieu séjourne à Paris. Françoise de Graffigny (1695-1758) fait
paraître un roman épistolaire, Lettres
d’une péruvienne qui obtient un immense succès immédiat. Montesquieu
reprend Arsace et Isménie. En juin,
Montesquieu annonce à Maupertuis qu’il a achevé De l’esprit des lois. Il séjourne auprès de l’ancien roi de Pologne
et duc de Lorraine depuis 1737 Stanislas Leszczynski ou Leczinski (1677-1766) à
Lunéville (actuellement dans le département de Meurthe et Moselle). En juillet,
il fait la lecture de De l’esprit des
lois à Paris.
De janvier à
avril 1748, Montesquieu séjourne à Paris. Il vend définitivement sa charge de
président à mortier le 4 avril. Il publie en novembre 1748 à Genève, chez
Barillot, sans nom d’auteur : De
l’esprit des lois ou du rapport que les lois doivent avoir avec la Constitution de
chaque gouvernement, les Mœurs, le Climat, la Religion , le Commerce,
etc. Mis en vente à Paris, l’ouvrage connaît immédiatement le succès.
Vingt-deux éditions paraissent à Genève en deux ans.
De janvier à
juin 1749, Montesquieu séjourne à Bordeaux. De juillet à décembre, De l’esprit
des lois est attaqué dans les Nouvelles
ecclésiastiques du 9 au 16 octobre.
En février 1750,
séjournant à Paris, il répond aux critiques de son œuvre majeure en donnant la Défense de l’Esprit des lois puis les Éclaircissements sur l’Esprit des lois.
En septembre, la Sorbonne présente un premier projet de censure du grand
ouvrage de Montesquieu. Le 26 novembre, Montesquieu fait enregistrer son
testament.
De janvier à
mai 1751, Montesquieu séjourne à Paris. Il travaille à une nouvelle édition des
Lettres persanes. Il travaille aussi
sur De l’esprit des lois. Montesquieu
est nommé membre associé de la Société royale des sciences et belles-lettres de
Nancy le 20 mars. Il offre à Stanislas Leszczynski, le duc souverain de
Lorraine, Lysimaque. L’abbé
Jean-Baptiste Gaultier (1685-1755), un janséniste, fait paraître les Lettres persanes convaincues d’impiété.
Il critique notamment les lettres qui portent sur la religion (XXXV, XLVI,
LXXXIII, XCII et CXXV), la lettre sur le suicide (LXXVI) ainsi que celle sur le
divorce (CXVII). Le 29 novembre l’Église catholique romaine interdit le livre –
de même que de nombreux autres ouvrages de Montesquieu – et l’inscrit à
l’Index, c’est-à-dire dans la liste des ouvrages interdits aux catholiques. Le
protestant Angliviel de la Beaumelle (1726-1773) publie une Suite de la défense de l’esprit des lois
à Amsterdam en novembre.
En 1752,
Montesquieu séjourne à Bordeaux.
De janvier à
novembre 1753, Montesquieu séjourne à Paris. Il publie un Mémoire sur la Constitution (Unigenitus) qui propose d’interdire
toute dispute sur la querelle du jansénisme afin d’obtenir la paix. En
décembre, il revient à Bordeaux. Il commence à écrire l’article
« Goût » pour l’Encyclopédie.
De janvier à
juillet 1754, Montesquieu séjourne à Paris. Il ajoute et corrige les Lettres
persanes dans une édition qui reprend les 150 lettres de la première
édition, un Supplément comprenant les
trois nouvelles lettres de la deuxième édition de 1721, de huit nouvelles
lettres (XV, XXII, LXXVII, XCI, CXLIV, CLVII, CLVIII, CLX de l’édition de 1758),
des changements aux lettres LXXXII, XCII, CIX, et XCVII de l’édition de 1758) et
un préambule intitulé Quelques réflexions
sur les Lettres Persanes qui procèdent à une réfutation de Gaultier qui
n’est pas nommé. De juillet à décembre, il est à Bordeaux. Il travaille à une
nouvelle édition de De l’esprit des lois.
En décembre, Lysimaque est publié.
Fin décembre, il repart à Paris.
Le 19 janvier
1755, il tombe malade. Il meurt le 10 février à Paris d’une fièvre
inflammatoire. D’après Friedrich Melchior Grimm (1723-1807), Denis Diderot (1713-1784)
fut le seul homme de lettres qui assista à son enterrement à Saint Sulpice où
il a eu peu de monde (cf. http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/charles-de-secondat-baron-de-montesquieu).
En 1757, son
article « Goût » est publié sous le titre d’Essai sur le goût. Il paraît dans le tome VII de l’Encyclopédie.
En 1758, son
fils Jean-Baptiste de Secondat et l’avocat François Richer (1718-1790) font
paraître l’édition posthume des Lettres persanes. Elle répartit les
lettres ajoutées dans l’édition de 1754 à leur place. De même, une nouvelle
édition de De l’esprit des lois
paraît.
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