On peut encore démontrer la sphéricité de la terre par les phénomènes qui frappent nos sens. Ainsi, si l’on supposait que la terre n’est pas sphérique, les éclipses de lune ne présenteraient par les sections qu’elles présentent, dans l’état actuel des choses ; car la lune, dans ses transformations mensuelles, affecte toutes les divisions possibles, tantôt demi-pleine, tantôt en croissant, tantôt pleine aux trois quarts ; mais dans les éclipses, la ligne qui la termine est toujours courbe. Par conséquent, comme la lune ne s’éclipse que par l’interposition de la terre, il faut bien que ce soit la circonférence de la terre, qui, étant sphérique, soit cause de cette forme et de cette apparence.
Bien plus, d’après la manière même dont les astres se montrent à nous, il est prouvé que non seulement la terre est ronde, mais même qu’elle n’est pas très grande ; car il nous suffit de faire un léger déplacement, soit au midi, soit au nord, pour que le cercle de l’horizon devienne évidemment tout autre. Ainsi les astres qui sont au-dessus de notre tête subissent un changement considérable, et ils ne nous semblent plus les mêmes, selon qu’on va au midi, ou au nord. Il y a certains astres qu’on voit en Égypte et à Chypre, et qu’on ne voit plus dans les contrées septentrionales. Certains astres, au contraire, qu’on voit constamment dans les contrées du nord, se couchent quand on les considère dans les contrées que je viens de nommer. Ceci prouve non seulement que la forme de la terre est sphérique, mais encore que sa sphère n’est pas grande ; car autrement on ne verrait pas de tels changements pour un déplacement si petit.
Ainsi, quand on suppose que le pays qui est aux colonnes d’Hercule (1) va se rejoindre au pays qui est vers l’Inde, et qu’ainsi il n’y a qu’une seule et unique mer, on ne me paraît pas faire une supposition par trop incroyable. On cite entr’autres preuves les éléphants, dont l’espèce se retrouve à ces deux extrémités du globe ; ce qui n’est possible que si ces deux extrémités se tiennent et se rejoignent en effet.
Aristote, Traité du ciel(iv° siècle av. J.-C.)
(1) colonnes d’Hercule : nom chez les Grecs du détroit de Gibraltar. Christophe Colomb (1451-1506) connaissait cette thèse d’Aristote qui a vraisemblablement inspiré son voyage.
Preuve empirique de Strabon (58 av. J.-C.-25 ap. J.-C.) qui montre la sphéricité de la Terre.
Gnomon (n.m.) : instrument formé d’une tige verticale projetant l’ombre du soleil ou de la lune sur un écran horizontal et permettant ainsi de mesurer leur hauteur au-dessus de l’horizon.
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