jeudi 31 mars 2022

leçon sur la religion

Introduction : le fait religieux

On a l’habitude de définir la religion par la croyance en Dieu, surtout là où sont présentes des religions monothéistes (judaïsme, christianisme, islam) qui font de la croyance en un Dieu unique une obligation commandée par Dieu lui-même.

Pourtant, il est difficile de refuser le nom de religion à des croyances où il y a de nombreux dieux comme les polythéismes anciens, gréco-romains ou le polythéisme indien contemporain, voire le polythéisme japonais. Même sans dieux on peut parler de religion à propos de certaines pratiques, interdits ou pratiques alimentaires (ne pas consommer certains aliments ou inversement les consommer dans des repas obligatoires comme dans certaines formes de cannibalisme ou des sacrifices rituels comme dans l’ Antiquité), interdits sexuels, rites divers, mythes racontés.

On peut appeler fait religieux la présence dans les sociétés humaines de croyances et de pratiques qui reposent sur la distinction des choses sacrées et des choses profanes, les premières ayant une valeur absolue, les secondes une valeur relative.

Comment expliquer la présence du fait religieux qui paraît souvent si contraire à la raison, au moins des non croyants, dans les sociétés humaines ?

Peut-on légitimement croire au Dieu du monothéisme ?

Dans la mesure où on constate une diminution des pratiques religieuses, la religion peut-elle disparaître ?

 

I. Religion et société.

Les croyances et pratiques religieuses ne sont pas individuelles. Un vieux mythe représente les chrétiens persécutés sous l’empire romain se réunissant le soir dans des grottes ou les catacombes. Autrement dit, la religion est collective.

On peut alors soutenir qu’elle joue un rôle social, celui d’unir les hommes en les faisant agir et penser collectivement. une des étymologies de religion la dérive du latin « religare » qui signifie « relier ». elle relirait les hommes en les reliant au sacré. Même de nos jours, les cérémonies commémoratives, certaines manifestations collectives relèvent d’une sorte de religion civique analogue aux pratiques religieuses des polythéismes gréco-latin.

Toutefois, si la religion est une manifestation sociale, elle implique ici ou là, la foi en Dieu : est-ce raisonnable ?

 

II. Le pari selon Pascal.

Pascal, savant (mathématicien et physicien) et croyant a tenté de justifier la foi en Dieu qui était la sienne comme chrétien aux yeux de ceux qui la refusaient et qu’on nommait libertins au sens de ceux qui pensent librement hors du cadre religieux qui était obligatoire sous peine de mort sous l’ancien régime en France.

La foi peut paraître déraisonnable puisqu’elle exige d’adhérer à des mystères comme le péché originel qui rendrait compte de la méchanceté des hommes, le sacrifice de Dieu qui se fait homme pour racheter les péchés des hommes et permettre le salut d’au moins quelques-uns. Toutefois, la raison humaine ne peut rendre compte entièrement de l’existence de l’homme, elle peut tenter progressivement de l’expliquer, sans pouvoir soutenir qu’elle a une connaissance totale, ce qui serait s’attribuer l’omniscience divine ou adhérer à une sorte de foi en la raison tout autant injustifiable.

L’homme n’est pas capable de démontrer l’existence de Dieu car il est infiniment distant de lui ; il ne peut pas plus démontrer son inexistence : c’est donc une question de foi, c’est-à-dire de confiance en une parole qui ne peut se prouver comme toute foi, confiance qu’il faut choisir.

Il ne reste selon Pascal dans les Pensées, qu’à parier sur l’existence d’un Dieu qui promet la vie éternelle à ceux qui croient en lui et vivent selon la morale.

On ne peut pas ne pas parier car on est embarqué sur le vaisseau de la vie et le pari lui révèle un sens.

Et on ne peut que gagner car dans l’hypothèse où Dieu ne serait pas, il reste à vivre une vie morale :

« Or quel mal vous arrivera(-t-)il en prenant ce parti ? Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnaissant bienfaisant, ami sincère, véritable... À la vérité vous ne serez point dans les plaisirs empestés, dans la gloire, dans les délices, mais n'en aurez-vous point d'autres ? » (Pascal, Pensées)

Ainsi peut-on avoir foi en une religion qui elle-même soutient qu’elle est une sottise par un pari qui une sorte de calcul des probabilités, qui implique un engagement.

Toutefois, le pari de l’absence de religion peut aussi être envisagé comme permettant de vivre pleinement sur terre.

Peut-on alors se passer de religion ?

 

III. L’opium du peuple ?

Pour se passer de la religion il faut la critiquer, et on peut le faire en la considérant comme une création humaine, création humaine d’un homme qui pense en Dieu ce qu’il devrait être, qui se perd en lui. Ce que soutenait le philosophe Feuerbach.

Toutefois, reste à comprendre comment cette création est possible. On l’a vu elle a une origine sociale. On peut alors y voir comme le jeune Marx dans la Critique de la philosophie du droit de Hegel, la création de l’homme en tant qu’il vit en société et qu’il exprime à travers elle sa critique d’un monde où il souffre. Les promesses religieuses sont l’expression des souffrances sociales de l’homme.

La comparaison de la religion avec l’opium indique qu’elle produit un effet analogue, à savoir faire vivre l’homme dans l’imaginaire pour fuir un réel décevant.

C’est donc en changeant une société qui plonge l’homme dans la misère qu’il est possible de faire disparaître la religion.

Or, de même que le sacré n’a pas disparu des sociétés contemporaines, on peut douter que de simples améliorations sociales suffisent à faire disparaître la religion comme foi en une promesse d’une tout autre vie qui ne se situe pas sur le plan social.

 

Conclusion

La religion apparaît comme un besoin social mais aussi individuel dan la mesure où elle lie les hommes et leur promet une vie sensée que la réalité, notamment social ne leur donne pas.

La raison ne peut la rejeter dans la mesure où elle se situe sur le plan de la révélation qui n’est pas une impossibilité logique. Mais la révélation ne peut s’imposer, elle relève d’un choix, celui de l’adhésion à une parole dont le sens n’est pas évident.