samedi 8 septembre 2018

1. Leçon sur la raison et la croyance

Introduction.
La croyance consiste à accepter une idée sans preuve. Soit elle porte sur un fait soit elle concerne une personne. Ex : je crois que Sydney existe ou je crois que Henri IV a existé ; je crois en mon ami Gontran ou en mon amie Cunégonde. La deuxième forme de croyance est la foi (ex : avoir foi en Dieu).
La raison, c’est la faculté de lier des idées. D’où le raisonnement. C’est elle qui nous invite à chercher des preuves pour savoir et non simplement croire. Elle pourrait se définir comme la faculté qui nous permet de distinguer le vrai du faux, voire le bien du mal.
Ex : la Terre est ronde : c’est une croyance.
Ex : la Terre est ronde car lors des éclipses de Lune, on voit toujours une forme courbe (cf. Le document : La sphéricité de la Terre dans l’Antiquitéhttp://laphilodeluxe.blogspot.com/2018/09/document-la-sphericite-de-la-terre-dans_8.html) : c’est une connaissance.
La raison semble préférable à la croyance, non pas pour persuader car la croyance le permet, mais pour découvrir la vérité et en être alors convaincu.
Toutefois, il y a des cas où chercher à prouver n’est peut-être pas la meilleure solution. Par exemple, dans l’amitié ou l’amour.
De la raison ou de la croyance, laquelle est préférable et dans quel domaine ?

I. « Penser est une aventure ».
Si la raison veut pouvoir s’exercer et donc chercher des preuves, elle doit refuser toutes les croyances. Sinon, elles influeront sur ce que l’esprit accepte ou pas. Ainsi voit-on certaines croyances religieuses conduire à refuser certaines hypothèses à tester. Par exemple, le passage de la Bible (Josué 10 : 12) où Dieu est censé arrêter la course du Soleil pour aider les armées de Josué, a servi à refuser l’hypothèse d’une Terre en mouvement autour du Soleil.
Il faut donc que la raison remette tout en cause, qu’elle doute de tout, y compris de ce qu’on croit savoir. Dès lors, on peut dire avec Alain que « Penser est une aventure » (Propos sur la religion (1938), LVI Le dieu égyptien, propos du 29 octobre 1923).
Car, qui exerce sa raison ne peut savoir ce qui en résultera. Et l’aventure est préférable à la routine qui ne nous permet pas de savoir quoi que ce soit.Or, dans cette hypothèse, il n’y aurait aucune pensée à laquelle on pourrait s’arrêter. Et surtout on ne pourrait jamais commencer de penser. Ne faut-il pas alors admettre sans (les) discuter certaines idées ? Comment les admettre ?

II. Le cœur et la raison.
Il faut qu’il y ait des principes pour qu’on puisse user de la raison. Par principe, il faut entendre une proposition, vraie, indémontrable et qui sert à démontrer d’autres propositions (éventuellement avec l’aide d’autres principes). Les propositions démontrées sont des conséquences. C’est ce que font les mathématiciens par exemple.
Si on n’admet pas des principes, alors, le seul usage possible de la raison consistera à refuser toute possibilité de démontrer ou de prouver une vérité. Car, comme on ne peut démontrer à l’infini, ce sur quoi on s’appuiera ne sera qu’une simple hypothèse, c’est-à-dire une proposition dont on ne sait si elle est vraie ou fausse. Telle est la position des sceptiques (comme Sextus Empiricus), c’est-à-dire des philosophes pour qui la vérité est inconnaissable.
Or il y a une contradiction dans la position des sceptiques puisqu’ils usent de la raison tout en lui refusant la possibilité d’atteindre le vrai. Il faut donc admettre des principes mais d’où peuvent-ils venir ?
On peut donc avec Pascal dans les Pensées distinguer le cœur et la raison. Le premier permet de connaître les premiers principes, c’est-à-dire les propositions qui sont à la base de toute connaissance. La vérité des principes se sent ; elle ne se conclut pas. Et c’est à partir de ses principes qu’on peut déduire à titre de conséquences d’autres vérités : tel est le rôle de la raison.
Il est alors possible d’admettre les vérités de la foi comme des vérités du cœur. C’est vrai de la confiance qu’on a dans les autres et également des croyances religieuses. Car la raison ne peut les réfuter.
Toutefois, si dans les sciences, il y a des principes, ils sont valables universellement et surtout l’expérience peut venir les remettre en cause. Par contre, comment savoir si c’est le judaïsme, le christianisme, l’islam ou l’hindouisme qui est la vraie religion, voire s’il y en a une ?
Il n’est donc pas possible de toujours faire confiance au cœur. Si donc ni la croyance ni la raison ne peuvent prétendre atteindre la vérité, laquelle peut toutefois être préférée ou bien faut-il choisir arbitrairement l’une ou l’autre ?

III. La valeur de la philosophie.
On peut considérer que les simples croyances, si elles permettent de vivre, ne permettent en aucun cas d’avoir l’esprit ouvert. Qui se contente de répéter les croyances qui ont cours dans sa société, voire dans le petit groupe de ceux avec qui il vit, est en quelque sorte enfermé dans un cercle étroit de “pensées”. Non seulement il ne peut découvrir de vérités, mais il ne peut corriger ses erreurs. Il ne peut même concevoir ce qui est différent de son point de vue.
Si donc la raison dans son exercice ne peut garantir de découvrir la vérité, elle peut suggérer des possibilités en remettant en cause les croyances admises. C’est en ce sens que la philosophie a une valeur dans la mesure où elle est un exercice de la raison. Elle conduit comme Russell le montre dans ses Problèmes de la philosophie à ouvrir l’esprit. C’est bien le doute qui résulte de l’exercice de la raison qui conduit à libérer l’esprit de ses préjugés. Tout au moins, à en éliminer provisoirement certains. Si au bout de l’exercice de la raison se trouve la croyance, voire la foi, alors, elle est un résultat qui peut toujours être remis en cause. La croyance est alors éclairée. Le dogmatisme au sens courant, c’est-à-dire le refus de toute pensée autre, est limité, voire éradiqué.

Bilan.
On ne peut préférer la raison à la croyance dans la mesure où la première ne permet pas seule de découvrir la vérité, ni la croyance à la raison dans la mesure où elle ne peut garantir non plus la découverte de la vérité. On peut par contre s’appuyer sur la raison pour remettre en cause les croyances qu’on nous inculque et ainsi s’ouvrir l’esprit.
Pour découvrir la vérité, ne faut-il pas alors s’en tenir à l’expérience ?


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