jeudi 30 avril 2015

Fiche 5 : La justice et la loi (terminale technologique)

Lucas Cranach l’Ancien (1472-1553),
Le Christ et la femme adultère, 1532,
huile sur panneau de bois, 83 x 121 cm,
Budapest, Szépmûvészeti Múzeum.

Analyse.
La justice désigne d’abord ce qui est légal. Il faut comprendre par là que la justice se situe dans le cadre des lois ou des coutumes d’un pays. Non seulement elle est l’application de lois et coutumes particulières à un temps et un lieu, mais elle désigne aussi les décisions singulières prises en applications des obligations légales. L’injustice consiste alors à ne pas s’en tenir à ce qui est légal. Par exemple, Socrate, condamné à mort alors qu’il se pense innocent, accepte sa sentence pour rester juste (cf. Platon, Criton).
La justice désigne ensuite ce qui est légitime au sens moral. On veut dire par là qu’il peut y avoir des lois et des coutumes qui ne sont pas justes. Par exemple, la loi qui condamnait à mort les homosexuels en France au XVIII° siècle nous paraît injuste. De même, la loi qui permettait au mari d’exécuter sa femme en public ainsi que son amant en Espagne. On doit penser alors à l’idée d’une justice universelle, valable partout et à toutes les époques. On parle parfois de justice naturelle par opposition à la justice positive.

La loi désigne dans les sciences l’expression d’un rapport nécessaire ou probable entre des phénomènes ou des faits. C’est en ce sens qu’on parle en physique de la loi de la gravitation universelle ou des lois de Mendel en biologie. Il ne peut y avoir alors d’injustice de la loi, à moins de se placer au point de vue de la « création » et de s’interroger sur son sens moral. Si la société a des lois en ce sens, il est impossible de les transgresser. Les connaître permet de savoir comment agir pour parvenir à ses fins comme le marin se sert de sa connaissance du vent pour amener le bateau à bon port.
La loi désigne autrement, du point de vue humain une prescription ou une interdiction obligatoire. Il faut entendre par obligation ce qu’on est tenu de faire ou de ne pas faire et qu’on peut ne pas faire car à l’impossible nul n’est tenu. L’obligation peut se distinguer de la contrainte lorsqu’elle est vécue par le sujet comme un engagement de sa part. Elle s’en distingue aussi et surtout lorsqu’elle est légitime alors que la contrainte ne l’est pas. Si je suis obligé de respecter le code de la route, je suis contraint d’obéir à un voleur qui me menace.
On distingue en ce sens les lois positives qui sont instituées par un pouvoir. On les distingue des décisions ou des applications qui sont singulières. Par exemple, si la loi donne à Rome un droit de vie et de mort sur les membres de sa famille, encore faut-il l’exercer. Ainsi, un certain « Egnatius Mécénius (…) fit en effet mourir son épouse sous les coups de bâton pour avoir bu du vin. Ce meurtre ne donna lieu à aucune accusation ; il n’y eut même personne pour le blâmer. Chacun pensait qu’elle avait justement expié par une punition exemplaire un manquement aux règles de la sobriété. Il est vrai que toute femme qui aime à l’excès l’usage du vin, ferme son cœur à toutes les vertus et l’ouvre à tous les vices. » Valère-Maxime (1er siècle), Actions et paroles mémorables, livre VI, chapitre 3.
On peut penser qu’outre les lois positives, il existe des lois naturelles, c’est-à-dire des obligations valables universellement et qui fondent la légitimité des lois positives, au nom desquelles il est possible de se dresser contre les lois positives, d’y désobéir. Le plus ancien exemple se trouve dans la pièce de Sophocle (~498-~406 av. J.-C.) où Antigone refuse d’obéir à la décision de Créon de ne pas enterrer son frère Polynice parce qu’il est un traître au nom des lois divines, supérieures aux lois de la cité.
Problèmes.
1. Dans la mesure où les lois sont variables et qu’elles avantagent la vie en société, l’homme entendu comme individu peut-il justement transgresser toutes les lois s’il en a le pouvoir ? Faut-il au contraire obéir aux lois quelles qu’elles soient pour maintenir l’ordre social ?
2. Pour que la justice soit, faut-il que la loi soit la même pour tous ou bien doit-elle tenir compte des différences entre les hommes, voire des inégalités ? Y a-t-il des inégalités justes ou toutes doivent-elles être détruites de la vie sociale ?

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