mercredi 15 avril 2015

Fiche D : La politique

Jacques-Louis David (1748-1825), Le serment du jeu de Paume, le 20 juin 1789, après 1791, Huile sur toile, 65 cm x 88,7 cm, musée Carnavalet, Paris.

Analyse.
Étymologiquement, la politique désigne l’expérience des Grecs. En effet, Hérodote (484-420 av. J.-C.), le « père de l’histoire », nous permet dans un débat qu’il propose entre deux Spartiates prisonniers et un satrape Perse d’en voir la spécificité. Les Spartiates vantent la liberté qu’ils connaissent et pour laquelle ils sont prêts à mourir et qu’ignore leur interlocuteur (cf. Hérodote, Histoires, VII Polymnie, 135). Dans la cité (polis) les citoyens sont libres, car ils ne sont pas gouvernés par un roi ou un tyran. Le pouvoir est au milieu, il n’appartient à personne. Les citoyens agissent les uns sur les autres ou avec les autres par la parole. Des lois écrites organisent les relations entre les hommes dans la cité. Et les actes politiques sont publics c’est-à-dire communs et non secrets.
Le philosophe Aristote qui a défini l’homme « un animal politique » (Politique, I, 2, 1253a ; cf. aussi Histoire des animaux, livre I, 487b-488a) nous permet de reconstituer ce sens originellement grec. Pour lui, la cité est cette forme de communauté humaine qui a pour fin de bien-vivre et qui réunit des hommes libres. Aussi, la cité implique de s’interroger sur la meilleure façon de commander des hommes libres sans attenter à leur liberté. Hérodote, en grec, fait s’interroger des Perses sur le meilleur régime : est-ce la démocratie, l’aristocratie ou la monarchie (Histoires, III Thalie, 80-82). C’est pourquoi pour Aristote comme pour son maître Platon, la justice est la vertu politique par excellence.
Cette conception grecque, partiellement reprise par Rome dont la cité (civitas) fut « République » (res publica) puis « Empire » (imperium), reste limitée et discutable. Car, en fait de liberté, ceux qui commandent peuvent passer pour les maîtres véritables et ceux qui sont commandés pour leurs esclaves. Telle est aussi la conception grecque qu’on trouve chez les Sophistes, voire chez l’historien Thucydide (460-395 ? av. J.-C.) leur élève. Quant à la république romaine, elle ne fut jamais égalitaire puisque le vote des classes les plus riches suffisait à assurer l’élection. Quant à l’empire, il vit nombre de césars ou empereurs chercher à gouverner comme des rois.
Si donc on pense que cette conception de la politique n’est qu’un idéal, voire une sorte de fiction à l’instar de Machiavel (Le Prince, Chapitre XV), ne faut-il pas alors penser que la politique désigne toutes les relations de pouvoir dans les sociétés humaines ? En ce sens, la forme grecque en serait un exemple et pas forcément le meilleur.
S’y oppose notamment la politique moderne dont on peut rapidement esquisser les traits. Elle part non des citoyens, mais des hommes comme être de passions. Aussi refuse-t-elle de penser l’homme comme un animal politique comme on le voit clairement chez Hobbes qui refuse explicitement cet axime dans Le Citoyen (1642). La politique désigne ce domaine où l’État exerce ses fonctions. L’État a affaire à la société, c’est-à-dire ce mode du vivre ensemble où chaque individu échange des biens, des services, voire des idées ou des sentiments en satisfaisant ses intérêts avec les autres et qui demande à être protégé des actions néfastes ou de l’absence d’actions des autres. Qu’on pense l’État comme la condition de l’exercice de la liberté privée ou au contraire comme l’instrument de la domination de classes, voire comme l’instrument de la domination de la race supérieure, l’État est le maître mot de la politique moderne, c’est-à-dire d’une politique qui vise à s’effacer comme fin de l’existence humaine.

Problèmes.
Pourquoi alors la politique ? Est-elle nécessaire à la vie humaine qui sans elle serait misérable ? Est-elle au contraire nécessaire seulement à la domination de certains sur d’autres ?
Dès lors, est-elle superflu, c’est-à-dire est-elle ce dont l’humanité doit finalement se libérer, voire ce qu’il faut limiter comme une sorte de mal nécessaire ?
Ou bien est-elle véritablement et comment la condition d’une vie meilleure ou chaque homme est pour chaque autre ?


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