lundi 9 novembre 2015

Descartes, Les passions de l'âme - analyse de l'article 3

Texte.
Art. 3. Quelle règle on doit suivre pour cet effet.
À quoi on ne trouvera pas grande difficulté si on prend garde que tout ce que nous expérimentons être en nous, et que nous voyons aussi pouvoir être en des corps tout à fait inanimés, ne doit être attribué qu’à notre corps ; et, au contraire, que tout ce qui est en nous, et que nous ne concevons en aucune façon pouvoir appartenir à un corps, doit être attribué à notre âme.
Descartes, Les passions de l’âme, première partie (1649).

Analyse.
L’objet de cet article est de poser la règle qui permet de distinguer les fonctions de l’âme de celle du corps posé dans l’article 2 comme principe méthodologique pour connaître les passions de l’âme comme actions du corps sur l’âme.
La connaissance de ce qui distingue l’âme du corps ne provient pas d’une réflexion de l’âme sur elle-même selon Descartes. Elle provient d’une réflexion sur les corps extérieurs de ce que l’âme découvre comme appartenant à l’homme tout entier. Si elle retrouve dans les corps inanimés ce qu’elle trouve en l’homme, la fonction appartient au corps, sinon la fonction appartient à l’âme.
La difficulté réside dans la définition de la notion de corps inanimé. Certes Descartes s’appuie sur sa distinction radicale entre l’âme et le corps, la substance pensante et la substance corporelle telle qu’il l’a pensée dans les Méditations métaphysiques et les Principes de la philosophie. La pensée ou conscience appartient à la première, l’étendue est l’essence de l’autre. Or, dans notre texte, il ne s’agit pas des attributs que l’âme peut penser, il s’agit de fonctions qu’il s’agit de distinguer alors qu’on en fait l’expérience dans l’union de l’âme et du corps. Et cette difficulté, il n’est pas sûr que Descartes puisse la lever dans les articles suivants. Spinoza n’a peut-être pas eu tort d’écrire :
« Personne, il est vrai, n’a jusqu’à présent déterminé ce que peut le Corps, c’est-à-dire l’expérience n’a enseigné à personne jusqu’à présent ce que, par les seules lois de la Nature considérée en tant seulement que corporelle, le Corps peut faire et ce qu’il ne peut pas faire à moins d’être déterminé par l’Âme. » (Éthique, III° partie, scolie de la proposition 2, traduction Charles Appuhn)




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