Enfance
et formation.
Karl
Marx est né à Trèves le 5 mai 1818 en Rhénanie alors sous domination
prussienne. Son père, Hirschel Marx (Ha Levi), avocat issu d’une famille de
rabbins et de marchands, s’est converti au protestantisme en 1816 pour pouvoir
exercer sa profession. Sa mère s’appelle Henrietta Pressburg Hirshel. Karl Marx
est baptisé dans le luthéranisme en 1824.
Entre
1830 et 1835, il fait ses études secondaires au lycée de Trèves. Après avoir
obtenu son Abitur (baccalauréat) dans un Gymnasium (lycée), Marx
entre à l’université.
D’abord
à Bonn pour y étudier le droit. Il suit aussi des cours de littérature. Sa vie
n’est pas très régulière (duel, incarcération pour ivresse et tapage nocturne).
Sa rencontre avec une jeune aristocrate Jenny von Westphalen ne plaît ni à ses
parents ni aux parents de la jeune fille. Aussi quitte-t-il Bonn.
Puis
à Berlin où il se consacre davantage à l'histoire et à la philosophie. Il suit
les cours de Savigny, le grand romaniste de l’école historique du Droit
(c’est-à-dire d’une école qui nie la notion moderne de droits de l’homme pour
considérer que tout droit est historique et relatif à une culture). Il suit
également ceux de Gans en 1836-1837, un disciple libéral de Hegel (1770-1831)
imprégné de la pensée de Saint-Simon (1760-1825). Il fréquente le Doktorglub,
rassemblement de jeunes-hégéliens où l’athéisme et les idées libérales sont à
l’honneur. Il y fréquente notamment Bruno Bauer (1809-1882), professeur de
théologie. Son père meurt au mois de mai 1838.
Il
finit ses études en 1841 par la présentation d’une thèse de doctorat : Différence
de la philosophie de la nature chez Démocrite et Epicure.
Débuts
philosophiques : les jeunes hégéliens.
À
Berlin, il appartient au cercle des “hégéliens de gauche”, dénommés aussi “Jeunes
hégéliens” qui cherchent à tirer des conclusions ou athées ou révolutionnaires
de la philosophie de Hegel (1770-1831).
L’hégélien
de gauche Ludwig Feuerbach (1803-1872) s’était lancé dans une critique de la
théologie à partir de 1836 et avait commencé à se tourner vers le matérialisme
(par opposition à l’idéalisme hégélien). En 1841, cette orientation
matérialiste prend le dessus dans sa philosophie (L’essence du Christianisme)
et se combine avec la dialectique dite idéaliste de Hegel pour lui donner un
caractère “scientifique” et historique saisissant le réel dans la logique de
son évolution. Cette position se heurte à la politique du gouvernement prussien
qui avait enlevé à Feuerbach sa chaire en 1832, puis lui avait interdit de
revenir à l’université en 1836. Pour finir, les mêmes autorités interdisent à
Bruno Bauer, autre grande figure de l’hégélianisme de gauche d’enseigner à Bonn
en 1841.
Marx,
après avoir obtenu son diplôme universitaire, part pour Bonn avec l’espoir d’y
devenir professeur. Mais face à cette politique du gouvernement, il abandonne
l’idée d’une carrière universitaire.
Au
début de 1842, certains bourgeois radicaux de Rhénanie, en contact avec les
Hégéliens de gauche, créent à Cologne un journal d’opposition au gouvernement, La
Gazette rhénane (Rheinische Zeitung). Ils proposent à Marx et Bruno
Bauer d’en devenir les principaux collaborateurs. En octobre 1842, Marx en
devient le rédacteur en chef et s’installe à Cologne.
La
tendance démocratique révolutionnaire du journal s’accentue sous la direction
de Marx. Le gouvernement réagit en lui imposant une double, puis une triple
censure. Le 1er janvier 1843 il l’interdit. Marx avait été contraint
de démissionner avant cette date, mais cela ne sauva pas le journal, qui
suspendit sa publication en mars 1843.
L’un
des principaux articles de Marx dans La Gazette rhénane est celui
consacré aux conditions de vie des vignerons de la vallée de la Mosell. Ce
reportage, ainsi que l’ensemble de ses activités journalistiques, lui fait
prendre conscience de ses insuffisances en matière d’économie politique et le
pousse à se lancer dans son étude approfondie (cf. Critique de l’économie
politique, 1859, Préface
En 1843 à
Kreuznach, Marx épouse Jenny von Westphalen. Issue de la noblesse prussienne, son frère aîné
deviendra ministre de l’Intérieur de Prusse au cours d’une des périodes les
plus réactionnaires que connut ce pays de 1850 à 1858. Ils eurent plusieurs
enfants mais seules trois filles parviendront à l’âge adulte (Laura, Eléanor et
Jenny). Laura épousera Paul Lafargue (1842-1911), socialiste français ayant
laissé dans ses Souvenirs personnels sur Karl Marx une biographie
intimiste du philosophe. Il est également l’auteur du fameux Droit à la
paresse où il propose une
« réduction
légale de la journée de travail à trois heures ».
À
l’automne 1843, Marx s’installe à Paris afin de publier un journal radical à
l’étranger avec Arnold Ruge (1802-1880). Un seul numéro des Annales
franco-allemandes est édité. La publication s’interrompt du fait des
grosses difficultés dans la distribution clandestine
du journal en Allemagne et aussi par suite de désaccords entre Marx et Arnold
Ruge. C’est à la même époque que Feuerbach rédige ses Principes de la
Philosophie de l’avenir.
La
coupure ?
En
septembre 1844, Marx rencontre Friedrich Engels (1820-1895) qui passe quelques
jours à Paris ; c'est le début d'une profonde amitié. Engels avait dû à
l'âge de 18 ans quitter le lycée pour devenir employé de commerce à Brême pour
des raisons familiales. Étudiant par lui-même la philosophie, il était devenu
partisan de Hegel tout en rejetant le soutien que celui-ci avait apporté à
l’État prussien. En 1842, il avait quitté Brême pour prendre un poste dans une
firme commerciale de Manchester dont son père était l’un des propriétaires. Là,
il avait rencontré la misère prolétarienne dans toute son ampleur et en avait
étudié systématiquement les conditions (La condition des classes laborieuses
en Angleterre, 1845).
Peu
après celle-ci, Marx et Engels travaillent de concert à leur première œuvre
commune : La sainte famille où ils s’attaquent à la philosophie
critique de Bruno Bauer dont ils avaient été proches. Vient ensuite L’Idéologie
Allemande (essentiellement rédigée par Marx) principalement axé autour
d’une critique très virulente de Max Stirner intitulée “Saint Max” et qui
occupe près des deux tiers de l’ouvrage. Cet ouvrage défend une conception
matérialiste de l’histoire qui dépassait la conception du matérialisme de
Feuerbach. Par une critique sévère de Bruno Bauer et de Max Stirner, Marx et
Engels marquent ainsi une rupture non seulement avec Feuerbach, mais aussi avec
le socialisme utopique et l’idéalisme hégélien de gauche, et plus largement
l’idéalisme de Hegel lui-même. Mais l’ouvrage ne trouve pas d’éditeur. Les
auteurs l’abandonnent à la critique rongeuse des souris. Il ne sera publié que
près d’un siècle plus tard en U.R.S.S. grâce à la découverte de Riazanov
(1870-1938). Dans les Thèses sur Feuerbach, court texte retrouvé dans le
même manuscrit, Marx y propose notamment sa thèse antiphilosophique fort
célèbre :
« Les
philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de diverses
manières ; ce qui importe, c’est de le transformer ». Thèses
sur Feuerbach, XI.
Au
milieu des années 1840, Marx et Engels prennent une part active dans la vie
alors bouillonnante des groupes révolutionnaires parisiens. Beaucoup d’entre
eux étaient particulièrement influencés par les doctrines de Pierre-Joseph
Proudhon (1809-1865) exprimées principalement dans son ouvrage Philosophie
de la misère. Relevons cette citation édifiante dans l’ouvrage du
théoricien anarchiste :
« Ainsi, sans un Dieu,
fabricateur souverain, l’univers et l’homme n’existeraient pas : telle est
la profession de foi sociale. » Proudhon,
Système des contradictions économiques ou Philosophie de la misère,
Prologue.
Marx
en fait une critique très sévère dans Misère de la Philosophie, ouvrage
rédigé en français. L'avant-propos montre le caractère polémique et ironique du
style de Marx :
« En
France, il [Proudhon] a le droit d’être mauvais économiste, parce qu’il
passe pour un bon philosophe allemand. En Allemagne, il a le droit d’être
mauvais philosophe, parce qu’il passe pour être économiste des plus forts.
Nous, en notre qualité d’Allemand et d’économiste, nous avons voulu protester
contre cette double erreur. »
Sur
la demande insistante du gouvernement prussien, Marx, considéré comme un
dangereux révolutionnaire, est chassé de Paris en 1845. Il en rend responsable
Guizot. Il arrive alors à Bruxelles. Sa maison, entre janvier 1847 et février
1848, sert de point de rencontre à tous les opposants politiques. Marx
participe à l’Association Démocratique de Bruxelles, dont il est élu
vice-président.
Le
communisme.
Au
printemps 1847, Marx et Engels rejoignent un groupe politique clandestin, la
Ligue des Communistes. Ils y prennent une place prépondérante lors de son
second congrès à Londres en novembre 1847. À cette occasion, on leur demande de
rédiger le Manifeste de la Ligue, connu sous le nom de Manifeste du
Parti communiste, qui paraît en février 1848. La première traduction
française sera due à Laura Lafargue, sa seconde fille.
Lorsqu’éclate
la Révolution de février 1848, Marx quitte la Belgique pour revenir à Paris.
Avec l’extension de la révolution à l’Allemagne, il part pour Cologne pour y devenir
rédacteur en chef de La Nouvelle Gazette Rhénane (Neue Rheinische
Zeitung) publiée du 1er juin 1848 au 19 mai 1849.
Avec
la victoire de la contre-révolution, Marx est poursuivi devant les tribunaux.
Il se défend devant les jurés en déclarant :
« Le
premier devoir de la presse est donc de miner
toutes les bases du système politique actuel ».
Il
est acquitté le 9 février 1849, mais le gouvernement l’expulse le 16 mai, bien
qu’il soit citoyen prussien.
Il
retourne alors à Paris dont il est de nouveau chassé après la manifestation du
13 juin 1849. Il part ensuite pour Londres où il résidera le restant de ses
jours.
La
vie de Marx en exil est extraordinairement difficile comme en témoigne sa
correspondance. Malgré l'aide financière d’Engels, lui et sa famille doivent
faire face à une extrême misère :
« Ma
femme est malade, la petite Jenny est malade, Léni a une sorte de fièvre
nerveuse. Je ne peux et je ne pouvais appeler le médecin, faute d’argent pour
les médicaments. Depuis huit jours, je nourris la famille avec du pain et des
pommes de terre, mais je me demande si je pourrais encore me les procurer
aujourd’hui » lettre à Engels du 4 septembre 1852.
L’un
de ses enfants, Edgar, mourra d’ailleurs
de faim.
Il
écrit alors une série de sept articles, rassemblés sous le titre Le 18
brumaire de Louis Bonaparte, décrivant les débuts de la deuxième République
française et son évolution vers le coup d'état du 2 décembre 1851 aboutissant
au Second Empire.
Ce
n’est qu’en 1861 que sa situation s’améliore quelque peu, grâce à l’aide
financière plus fournie d’Engels. En 1864 sa situation financière s’améliore
sérieusement grâce à l’héritage de sa mère qu’il accepta bourgeoisement. Elle
avait toujours refusé de lui verser la part qui lui revenait de son père. Le
train de vie de la famille Marx restera toujours d’un niveau modeste.
Il
consacre toutes les années 1850 à rédiger des centaines d’articles
« alimentaires » pour des journaux comme le New York Tribune
tout en se livrant à des recherches approfondies en économie, histoire,
politique, etc. Dans le même temps, il reste en correspondance avec les
révolutionnaires du continent et rédige des brochures politiques en lien avec
l’actualité. Il passe aux yeux des gouvernants prussiens comme le chef d’une
organisation de conspirateurs, alors que la Ligue des Communistes n’existe plus
depuis son autodissolution en 1852. Il est en fait isolé. Sa situation
économiquement précaire ralentit son travail.
Ce
n’est qu’en 1859 qu’il achève et publie la Critique de l'économie politique.
La préface y expose en une page les thèses essentielles de ce qu’il est convenu
de nommer le “matérialisme historique”.
« Le
résultat général auquel j’arrivai et qui, une fois acquis, servit de fil
conducteur à mes études, peut brièvement se formuler ainsi : dans la
production sociale de leur existence, les hommes entrent en des rapports
déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production
qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces
productives matérielles. L’ensemble de ces rapports de production constitue la
structure économique de la société, la base concrète sur laquelle s’élève une
superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de
conscience sociales déterminées. Le mode de production de la vie matérielle
conditionne le processus de vie social, politique et intellectuel en général.
Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; c’est
inversement leur être social qui détermine leur conscience. À un certain stade
de leur développement, les forces productives matérielles de la société entrent
en contradiction avec les rapports de production existants, ou, ce qui n’en est
que l’expression juridique, avec les rapports de propriété au sein desquels
elles s’étaient mues jusqu’alors. De formes de développement des forces
productives qu’ils étaient ces rapports en deviennent des entraves. Alors
s’ouvre une époque de révolution sociale. Le changement dans la base économique
bouleverse plus ou moins rapidement toute l’énorme superstructure. Lorsqu’on
considère de tels bouleversements, il faut toujours distinguer entre le
bouleversement matériel – qu’on peut constater d’une manière scientifiquement
rigoureuse ‑ des conditions de production économiques et les formes juridiques,
politiques, religieuses, artistiques ou philosophiques, bref, les formes
idéologiques sous lesquelles les hommes prennent conscience de ce conflit et le
mènent jusqu’au bout. Pas plus qu’on ne juge un individu sur l'idée qu’il se
fait de lui-même, on ne saurait juger une telle époque de bouleversement sur sa
conscience de soi ; il faut, au contraire, expliquer cette conscience par
les contradictions de la vie matérielle, par le conflit qui existe entre les
forces productives sociales et les rapports de production. Une formation
sociale ne disparaît jamais avant que soient développées toutes les forces
productives qu’elle est assez large pour contenir, jamais des rapports de
production nouveaux et supérieurs ne s’y substituent avant que les conditions
d’existence matérielles de ces rapports soient écloses dans le sein même de la
vieille société. C’est pourquoi l’humanité ne se pose jamais que des problèmes
qu’elle peut résoudre, car, à y regarder de plus près, il se trouvera toujours,
que le problème lui-même ne surgit que là où les conditions matérielles pour le
résoudre existent déjà ou du moins sont en voie de devenir. À grands traits,
les modes de production asiatique, antique, féodal et bourgeois moderne peuvent
être qualifiés d’époques progressives de la formation sociale économique. Les
rapports de production bourgeois sont la dernière forme contradictoire du
processus de production sociale, contradictoire non pas dans le sens d’une
contradiction individuelle, mais d’une contradiction qui naît des conditions
d’existence sociale des individus; cependant les forces productives qui se
développent au sein de la société bourgeoise créent en même temps les
conditions matérielles pour résoudre cette contradiction. Avec cette formation
sociale s’achève donc la préhistoire de la société humaine. » Marx, Critique de l’économie
politique, Préface.
Dans
cet ouvrage, sont présents tous les éléments essentiels de ses théories
économiques, en particulier la loi de la valeur, du Capital. Marx
écrit à cette époque :
« Je
ne pense pas qu’on ait jamais écrit sur l'argent tout en en manquant à ce
point ».
En
1859, il sort de son isolement politique pour prendre la direction du journal
germanophone Das Volk en lien avec les regroupements qui s’opèrent dans
le mouvement ouvrier allemand et qui vont déboucher sur la constitution par
Ferdinand Lassalle (1825-1864) du premier véritable parti ouvrier allemand
(ancêtre du S.P.D.).
En
1867 Marx publie enfin, après plus de 20 ans de travail, la première partie de
son ouvrage Le Capital. Il continue son travail pour achever les deux
tomes suivants mais, malade et manquant de temps, il ne laissera que des
brouillons inachevés.
L’internationalisme.
En
1864, il rédige l’Adresse Inaugurale de l’Association International des
Travailleurs, qui se fonde alors. Cette adresse inaugurale devient l’âme de
cette Première Internationale. Tout l’effort de Marx dans la rédaction de cette
inauguration tend à
unifier le mouvement ouvrier qui connaît toutes sortes de formes de
regroupements se réclamant du socialisme sur des bases diverses et
contradictoires : Mazzini (1805-1872) en Italie, Proudhon en France,
Michel Bakounine (1814-1876) en Suisse, syndicalisme britannique libéral
britannique, socialisme lassalien en Allemagne, etc.
La
Commune de Paris est écrasée en 1871. Marx rédige un texte qui est adopté par
l’Internationale : La Guerre civile en France. Karl Marx tire la
conclusion que le prolétariat ne peut pas se contenter de s’emparer de la
machine d’État pour la faire fonctionner à son profit : il devra la
détruire de fond en comble. Marx salue la nouvelle démocratie apparue avec la
Commune : le principe de l’éligibilité et la révocabilité des responsables
à tous les niveaux de la société (exécutif, législatif, judiciaire). Ce texte
fait grand bruit, et le nom de l’auteur est alors révélé : Karl Marx
acquiert pour la première fois une certaine renommée, y compris au sein du
mouvement ouvrier.
Des
divergences importantes apparaissent au sein de l’Internationale. En 1872, les
anarchistes avec Bakounine sont exclus (première manifestation d’envergure de
l’intolérance marxiste !), de part la constitution d’une fraction secrète
mais aussi à cause de la dégradation des rapports entre Marx et Bakounine. Une
partie importante des militants de l’Internationale ont préféré suivre les
principes fédéralistes prônés notamment par Bakounine. Ce dernier avait une
piètre idée du communisme de son camarade :
« Je
déteste le communisme, parce qu’il est la négation de la liberté et que je ne
puis concevoir rien d’humain sans liberté. Je ne suis point communiste parce
que le communisme concentre et fait absorber toutes les puissances de la
société dans l’État, parce qu’il aboutit nécessairement à la centralisation de
la propriété entre les mains de l’État. [...] Je veux l’organisation de la
société et de la propriété collective ou sociale de bas en haut, par la voie de
la libre association, et non du haut en bas par le moyen de quelque autorité
que ce soit. Voilà dans quel sens je suis collectiviste et pas du tout
communiste. » Etatisme et anarchie, 1873.
Étant
donné la quasi-disparition du mouvement ouvrier en France du fait de la
répression de la Commune, l’A.I.T. cesse pratiquement d’exister en Europe. Le
Conseil général de l’A.I.T. de Londres est transféré à New York, et une
internationale ouvrière fédéraliste réunissant des exclus se constitue la même
année.
La
santé de Marx est minée par son travail politique inlassable d’organisation de
l’Internationale et la rédaction encore plus épuisante de son œuvre. Il laisse
pour l’essentiel à Engels le soin de suivre les développements du S.P.D., même
si en 1875 Marx écrit une critique très dure du programme de Gotha du SPD. On y
lit notamment ce point programmatique positif qui n’est pas resté lettre morte.
« Entre
la société capitaliste et la société communiste, se place la période de
transformation révolutionnaire de celle-là en celle-ci. A quoi correspond une
période de transition politique où l'Etat ne saurait être autre chose que la
dictature révolutionnaire du prolétariat. » Marx, Critique du
programme de Gotha, 1875.
Karl
Marx se consacre ensuite essentiellement à l’achèvement du Capital, pour
lequel il collecte une grande masse de nouveaux matériaux et, en plus des
langues qu’il maîtrisait déjà (français, anglais, italien et allemand), apprend
le russe. Toutefois, sa santé déclinante l’empêche d'achever les deux derniers
volumes du Capital. Engels se chargera par la suite de rassembler et mettre en
forme ses notes afin de publier des matériaux partiels.
Jenny,
la femme de Marx, sans le soutien et le courage de laquelle il n’aurait pu
mener son combat pour l’émancipation humaine, décède le 2 décembre 1881. Les
deux époux avaient rompu avec leur classe d’origine, qui le leur fit payer
chèrement à eux et à leurs enfants. Mais aucun d’eux n'abdiqua son droit à la
liberté.
Après
un séjour en Algérie, Marx s’éteint paisiblement dans son lit le 14 mars 1883.
Il est enterré près de sa femme dans le cimetière de Highgate à Londres,
Angleterre.
« Imagine
l’homme humain et son rapport au monde comme un rapport humain, et tu ne
pourras échanger l’amour que contre l’amour, la confiance que contre la
confiance, etc. Si tu veux jouir de l’art, tu devras avoir une culture
artistique ; si tu veux avoir un ascendant sur autrui, tu devras être
capable d’agir pour le bien des autres et exercer une influence stimulante.
Chacun de tes rapports avec l’homme ‑ et avec la nature ‑ devra être une
manifestation déterminée, conforme à l’objet de ta volonté, à ta vraie vie
individuelle. Si tu aimes sans susciter l’amour réciproque, si ton amour ne
provoque pas la réciprocité, si vivant et aimant tu ne te fais pas aimer, alors
ton amour est impuissant, et c’est un grand malheur. » (Économie et
Philosophie, L’argent, 1844)
Après sa mort, ses œuvres continueront à
être publiées, notamment les tomes 2 et 3 du Capital par Engels, non sans
arrangement comme le montrera la publication par David Riazanov. C’est
pourquoi, il y a différentes versions de ses œuvres posthumes.
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