vendredi 5 juin 2015

Platon, biographie

Platon avant Socrate.
Platon (Πλάτων) est né entre 428 et 426 av. J.-C dans une grande famille athénienne. Par son père, Ariston, il descendrait de Codros, un ancien roi légendaire d’Athènes. Par sa mère, il descendrait de Solon (~640-~558 av. J-C.), le législateur. Des traditions tardives font de Platon un fils d’Apollon qui aurait consommé le mariage à la place de son père.
Il s’appelait Aristoclès. Platon est son surnom ; “platos” signifie “largeur” en grec. Est-ce la largeur de son front ou de ses épaules ? Est-ce l’ampleur de son style ? (cf. Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres, III).
Il avait deux frères, Adimante et Glaucon, à qui il fait donner la réplique à Socrate dans La République. Il a eu une sœur, Potonè, la mère de Speusippe, qui lui succèdera à l’Académie.
Platon a reçu une éducation soignée, celle de tous les jeunes athéniens nobles. Il a appris à lire et à écrire avec les grands poètes comme Homère (ix° av. J.-C.) et Hésiode (viii° av. J.-C.). Il a appris également la musique au sens large et la gymnastique.
Fut-il le disciple de Cratyle (v° av. J.-C.), lui-même élève d’Héraclite dit l’Obscur (~541-~480 av. J.-C.), comme Aristote son élève l’a soutenu ? C’est possible. A-t-il été l’élève d’un disciple de Parménide (VI°-V° av. J.-C.), Hermogène, comme le soutient Diogène Laërce (op. cit.) ? Difficile de le garantir. Cratyle et Hermogène sont les interlocuteurs de Socrate dans un dialogue de Platon qui a le nom du premier de sorte qu’on peut se demander si ce n’est pas rétrospectivement qu’on en a fait ses maîtres.
Toujours est-il qu’il se destine à la politique et au théâtre, deux activités qui ne s’opposaient nullement comme l’a montré Sophocle (496-406 av. J.-C.).
Comme tout jeune athénien il a dû faire son éphébie, c’est-à-dire son service militaire.

Platon avec Socrate.
On place sa rencontre avec Socrate (~469-399 av. J.-C.) vers sa vingtième année, soit entre 408 et 406. Une tradition veut qu’il ait alors brûlé toutes les tragédies qu’il avait écrites (cf. Diogène Laërce, Vies, III).
Un passage de l’Apologie de Socrate peut être considéré comme autobiographique. Platon y fait dire à Socrate qu’il est imité par de jeune gens riches dans son interrogation des prétendus sages.
« … beaucoup de jeunes gens, qui ont du loisir, et qui appartiennent à de riches familles, s’attachent à moi, et prennent un grand plaisir à voir de quelle manière j’éprouve les hommes ; eux-mêmes ensuite tâchent de m’imiter, et se mettent à éprouver ceux qu’ils rencontrent ; et je ne doute pas qu’ils ne trouvent une abondante moisson ; car il ne manque pas de gens qui croient tout savoir, quoiqu’ils ne sachent rien, ou très-peu de chose. Tous ceux qu’ils convainquent ainsi d’ignorance s’en prennent à moi, et non pas à eux, et vont disant qu’il y a un certain Socrate, qui est une vraie peste pour les jeunes gens… » Platon, Apologie de Socrate, 23c-d.
En 404, Athènes perd la guerre qui l’oppose à Sparte depuis 431. Un nouveau régime, celui des Trente Tyrans se met en place. Parmi eux se trouve Critias, son cousin du côté maternel et Charmide, son oncle maternel. Les exactions commises par ces anciens élèves de Socrate conduisent au rétablissement de la démocratie en 403 sous la conduite de Thrasybule. Critias et Charmide trouvent la mort dans les combats. Platon dira dans la Lettre VII combien il fut déçu par ce gouvernement tyrannique. Il sera tout autant déçu par la démocratie car c’est un chef du parti démocratique, Anytos, qui soutiendra l’accusation par Mélétos de son maître, Socrate, avec l’aide de Lykon.
Il assiste au procès de son maître en 399 avant J.-C. L’acte d’accusation est ainsi libellé :
« Socrate est coupable en ce qu’il corrompt les jeunes gens, ne reconnaît pas la religion de la cité et met à la place des extravagances démoniques » Platon, Apologie de Socrate, 24b-c, traduction Victor Cousin (1792-1867) modifiée.
Ou bien Socrate si on en croit son autre disciple Xénophon (430-355 av. J.-C.), y était
« accusé par ses adversaires de ne pas reconnaître les mêmes dieux que l’État, d’introduire des divinités nouvelles et de corrompre la jeunesse » Xénophon, Apologie de Socrate, 10, traduction Pierre Chambry.
Platon est prêt à participer au paiement de l’amende (cf. Apologie de Socrate, 34a). Mais Socrate est condamné à mort. Il refuse de s’évader pour rester un homme juste, c’est-à-dire qui obéit aux lois et décisions de la Cité (cf. Criton). Il boit la ciguë quelques temps après. Platon est absent au moment de la mort du maître car il est malade (cf. Phédon, 59 b).

Platon après Socrate.
Platon s’exile avec d’autres disciples de Socrate par crainte d’être également accusé comme élève de Socrate. Il se réfugie dans la ville voisine d’Athènes, Mégare, vraisemblablement dans l’école du philosophe Euclide de Mégare (~450-~380 av. J.-C.). Peut-être est-il rentré à Athènes au bout de trois ans.
Ensuite, il voyage. Peut-être est-il allé en Égypte. Le voyage en grande Grèce, c’est-à-dire dans le sud de l’actuelle Italie pour rendre visite au tyran de Tarente, le pythagoricien Archytas (~435-347 av. J.-C.), est plus sûr.
En 388, il tente de convertir à la philosophie, mais sans succès, le tyran de Syracuse, Denys 1er l’Ancien (431-367 av. J.-C.). Il devient l’ami du jeune Dion (408-354), dont la sœur avait épousé le tyran. Sur le chemin du retour à Égine alors en guerre avec Athènes, il aurait été vendu comme esclave, puis racheté par un de ses amis nommé Annicéris.
Vers 387, il achète un domaine doté d’un gymnase et d’un parc situé près du bois sacré du héros Académos à Athènes. Il en fait une école ou plutôt une sorte d’université que l’on nomme depuis l’Académie. On y trouve des salles de cours, des logements pour les étudiants qui affluent de la Grèce entière, une bibliothèque. Elle fermera une première fois en 86 av. J.-C. lorsque Sulla (138-78 av. J.-C.) pillera Athènes lors de la guerre qui l’opposait à Marius (157-86 av. J.-C.). Elle rouvrira en 176 grâce à l’empereur Marc-Aurèle (121-180) qui fait renaître également l’école d’Aristote, le lycée, l’école stoïcienne et l’école épicurienne. Elle connaîtra un dernier éclat avec le néoplatonisme qui constituera toute la philosophie à partir du III° siècle. Sa fermeture définitive aura lieu en 529 après J.-C. lorsque l’empereur Justinien (483-565) interdira aux non chrétiens l’enseignement de la philosophie. Cette très longue durée explique en partie la remarquable conservation des œuvres de Platon.
Au printemps 366, à la demande de son ami Dion, il retourne en Sicile pour former le successeur de Denys l’ancien, son fils, Denys II le Jeune (397-342 av. J.-C.). Disciple peu enclin à suivre les prescriptions pratiques de la philosophie platonicienne, Denys le Jeune exile bientôt Dion et relâche Platon qui était devenu prisonnier.
Il revient une troisième fois en 361 pour aider Dion qui avait été exilé. Ses relations avec Denys le Jeune se tendent rapidement. Il faut l’intervention d’Archytas de Tarente (~435-347 av. J.-C.), homme politique et philosophe, pour qu’il soit libéré. À cette occasion, il se serait procuré les manuscrits du pythagoricien Philolaos (V° av. J.-C.) pour une forte somme.
Si la Lettre VII qui nous a été conservée sous son nom est authentique, ces différentes tentatives ne sont pas étrangères à sa philosophie, bien au contraire. Platon a voulu ne pas se contenter de discours. Il lui fallait aussi montrer que la philosophie pouvait avoir des effets réels.
De retour à Athènes, il continue son enseignement jusqu’à sa mort vers 347 av. J.-C. Parmi ses élèves, il eut Aristote (384-322 av. J.-C.) qui demeura vingt ans auprès de lui.

Ses œuvres.
Il est assez difficile de classer chronologiquement les œuvres de Platon. Toutefois, on peut proposer un classement grossier en utilisant comme critère ce qu’on pense être l’enseignement de Socrate à partir de l’Apologie de Socrate de Platon lui-même. En effet, celui-ci y déclare ne rien savoir si ce n’est qu’il ne croit pas savoir ce qu’il ne sait pas. Dès lors, les dialogues aporétiques, c’est-à-dire qui ne donnent pas de solution au problème posé ont des chances d’être les premiers.
À ce critère, il faut ajouter les indications que nous pouvons avoir et qui sont sûrs concernant la composition des dialogues lorsqu’il y a des indications aux événements qui donnent une date en deçà de laquelle le texte n’a pu être écrit.
Enfin, Platon a introduit progressivement la notion d’Idées ou de Formes qui sont étrangères à nombre de dialogues. Ce critère permet de regrouper les dialogues où il élabore sa doctrine.
D’où l’ordre suivant (les titres sont suivis du thème qui a été ajouté après la mort de Platon) :
Les dialogues socratiques : Apologie de Socrate, Criton sur le devoir, Premier Alcibiade sur la nature de l’homme, Hippias mineur sur le mensonge, Hippias majeur sur le beau, Euthyphron sur la piété, Lachès sur le courage, Charmide sur la sagesse, Lysis sur l’amitié, Ion sur l’Iliade, Protagoras sur les sophistes, Euthydème sur l’éristique, Ménexène sur l’oraison funèbre.
Les dialogues intermédiaires :
Gorgias sur le rhétorique, Ménon sur la vertu, Le Banquet sur l’amour.
Les dialogues comprenant explicitement la théorie des Idées ou des Formes qui appartient en propre à Platon et qui lui sert à résoudre des problèmes :
Cratyle sur la justesse des noms, Phédon sur l’âme, La République sur la justice, Phèdre sur la beauté.
Les dialogues de la maturité :
Théétète sur la science, Parménide sur les idées, Le politique sur la royauté, Le sophiste sur l’être, Timée sur la nature, Critias sur l’Atlantide (inachevé), Le Philèbe sur le plaisir.
Le dernier ouvrage :
Les lois sur la législation.
Dialogues douteux ou considérés comme inauthentiques :
Second Alcibiade sur la prière, Épinomis.
Hipparque sur l’homme avide de gagner, Du Juste, De la Vertu, Démodocos sur la délibération, Sisyphe sur la délibération, Eryxias sur la richesse, Axiochos sur la mort, Les Rivaux sur l’amour du savoir, Théagès sur le savoir, Minos sur la loi, Clitophon, Définitions.
Treize Lettres nous ont été conservées. Peut-être sont-elles toutes inauthentiques. La Lettre VII donne des indications qui méritent le détour.



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