Paul Signac (1863-1935), Au temps d’harmonie (L’âge d’or n’est pas
dans le passé, il est dans l’avenir), 1893.
Analyse.
On peut
distinguer deux grands sens du bonheur.
Dans le
premier sens, le bonheur s’oppose au malheur. L’idée première qu’on retrouve
dans le mot lui-même est celle de la chance (heur) par opposition à la
malchance. Ainsi est un bonheur toute réussite, surtout si elle provient
d’événements extérieurs non voulus voire non prévus. En ce sens, le bonheur ne
dépend pas nous. Il survient dans l’accord contingent entre notre désir et la
réalité. On peut le relier au hasard ou plutôt à la fortune. Il en va ainsi de
celui qui trouve sur le marché où il ne le cherchait pas son débiteur avec de
l’argent (exemple inspiré d’Aristote, Physique,
II).
Dans le second
sens, le bonheur n’est pas exclusivement, voire pas du tout, un effet du
hasard.
Le bonheur se
distingue du plaisir à deux points de vue.
Alors que le plaisir est bref,
voire éphémère, le bonheur est durable. En ce sens, une simple réussite ne fait
pas le bonheur. On peut avec Sophocle aller jusqu’à dire qu’on ne peut
qualifier un homme d’heureux avant la fin de sa vie comme le montre Œdipe, roi
adulé, tombé dans le plus grand malheur lorsqu’il découvrit qu’il avait tué son
père, Laïos et épousé sa mère, Jocaste, à qui il a fait quatre enfants
(Polynice, Étéocle, Antigone et Ismène).
Alors que le plaisir ne dépend
pas de nous, le bonheur requiert notre initiative.
En ce sens, on
peut distinguer totalement le plaisir du bonheur. On le conçoit alors comme une
satisfaction qui trouve sa source dans la seule volonté. On peut alors parler
de joie. Le plaisir apparaît comme un obstacle ou comme indifférent au bonheur.
Alors que la volonté provient du choix et s’en tient à ce qu’on peut choisir ou
à ce qu’on doit choisir, le désir s’impose à nous. D’où la différence entre les
deux types de satisfaction. Le bonheur entendu comme satisfaction de la volonté
en tant qu’elle est libre est susceptible de ne dépendre que de l’individu.
On peut distinguer
le plaisir stable par opposition au plaisir en mouvement. En effet, lorsqu’on
satisfait un désir, il y a deux plaisirs différents. Le premier se situe dans
l’acte même de satisfaire le désir. Par exemple le plaisir que procurent les
aliments qu’on mange. C’est ce plaisir que les anciens nommaient plaisir en
mouvement. Le second provient du fait d’avoir satisfait le désir. Par exemple,
être rassasié. C’est lui que les anciens nommaient plaisirs stables.
On peut enfin
distinguer le plaisir du bonheur en considérant que celui-ci accompagne l’action
et n’est pas incompatible avec la peine alors que celui-là est reçu
passivement.
Problèmes.
1. Dans la mesure où l’homme ne
vit pas seul, peut-il pour être heureux satisfaire tous ses désirs ou bien
doit-il les limiter et comment penser alors qu’il soit pleinement
heureux ?
2. La recherche du bonheur
a-t-elle un sens et si oui lequel ou bien doit-elle être soumise à la recherche
du bien moral ?
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