Edward
Curtis (1868-1952), photographie d’un potlatch Kwakwaka’wakw (publiée entre
1907 et 1930)
Analyse.
La société, mot provenant du
latin « societas » qui veut
dire union, association, alliance, désigne tout groupe humain où les individus
entretiennent des relations suivies qui leur permettent de réaliser une ou
plusieurs fins communes. On peut penser à une famille, une tribu, une
entreprise, une nation, etc.
Les
relations sociales peuvent être comprises comme échanges. Le pluriel peut
d’abord s’entendre de la diversité de ce qu’on échange. Disons avec les
anthropologues qu’on échange dans les sociétés des biens (objets et services),
des mots et des femmes (mariage).
Si
on part des individus les échanges sont d’abord marchands ou commerciaux.
Chacun donne ce dont il n’a pas besoin pour recevoir de l’autre ce dont il a
besoin. On peut donner des biens contre d’autres biens ou contre des mots ou
contre des femmes (dot, etc.). Le lien social est alors constitué par le marché
où chacun trouve à réaliser ses propres fins. L’individu reste indépendant. On
parle d’un modèle individualiste de la société. L’individualisme peut s’entendre
de façon méthodologique (cf. Popper, Misère
de l’historicisme, 1956).
Si
on part de la société, les individus apparaissent comme ses membres et elle est
une réalité sui generis, c’est-à-dire
qu’elle existe par elle-même. C’est la société qui détermine la coopération et
les échanges. Le don est obligatoire et général. Il actualise ainsi le lien
social. L’échange a une fonction sociale. Ainsi, le don des femmes de la
famille qui réalise l’interdiction de l’inceste rend possible l’union entre les
familles qui constitue la société humaine. On parle d’un modèle holiste de la
société.
On
peut aussi concevoir un troisième modèle, inter-individualiste, selon lequel la
société réside dans les relations réciproques entre les individus qui les
constituent en même temps qu’elles la forment. Qu’ils soient marchands ou
sociaux, les échanges constituent les individus et déterminent leur place dans
la société.
Enfin,
le don pur, c’est-à-dire sans attente de retour, appelle la reconnaissance. On
peut alors concevoir un échange moral qui se situe au-delà de toute relation
sociale et qui constitue quelque chose comme l’idée d’un lien non à telle ou
telle société, mais à l’humanité tout entière.
Problèmes.
Les
problèmes qui en découlent nécessairement sont : 1. Y a-t-il un modèle de
société valable pour toutes les sociétés, c’est-à-dire quel type d’échange est
fondamental ? 2. Si les diverses sociétés suivent des modèles différents,
lequel est premier ? 3. Quel modèle est le meilleur du point de vue de la politique, c’est-à-dire du point de vue
de l’institution d’un espace public de discussion, voire au sens de l’exercice
du pouvoir sur une multitude humaine ? 4. Les échanges sont-ils
constitutifs du lien social ou bien sont-ils eux-mêmes dépendants de la
division du travail ? 5. L’homme est-il soumis à la société ou bien
est-elle pour lui source de liberté ou bien peut-il s’en libérer et
comment ?
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