samedi 2 mai 2015

Galilée : qualités premières et qualités secondes

C’est Locke qui, dans l’Essai philosophique concernant l’entendement humain, a nommé la distinction entre qualités sensibles en qualités premières et qualités secondes. Il revient à Galilée avant lui de proposer une telle distinction. C’est elle qui fonde la conception de la perception de la physique moderne et ouvre la philosophie moderne du sujet.

Je dis que je me sens nécessairement amené, sitôt que je conçois une matière ou substance corporelle, à la concevoir tout à la fois comme limitée et douée de telle ou telle figure, grande ou petite par rapport à d’autres, occupant tel ou tel lieu à tel moment, en mouvement ou immobile, en contact ou non avec un autre corps, simple ou composée et, par aucun effort d’imagination, je ne puis la séparer de ces conditions ; mais qu’elle doive être blanche ou rouge, amère ou douce, sonore ou sourde, d’odeur agréable ou désagréable, je ne vois rien qui contraigne mon esprit de l’appréhender nécessairement accompagnée de ces conditions ; et, peut-être, n’était le secours des sens, le raisonnement ni l’imagination ne les découvriraient jamais. Je pense donc que ces saveurs, odeurs, couleurs, etc. eu égard au sujet dans lequel elles nous paraissent résider, ne sont que de purs noms et n’ont leur siège que dans le corps sensitif, de sorte qu’une fois le vivant supprimé, toutes ces qualités sont détruites et annihilées ; mais comme nous leur avons donné des noms particuliers et différents de ceux des qualités (accidenti) réelles et premières, nous voudrions croire qu’elles en sont vraiment et réellement distinctes.
Galilée (1564-1642), L’Essayeur (1623), § 48.


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