C’est
Locke qui, dans l’Essai philosophique
concernant l’entendement humain, a nommé la distinction entre qualités
sensibles en qualités premières et qualités secondes. Il revient à Galilée
avant lui de proposer une telle distinction. C’est elle qui fonde la conception
de la perception de la physique moderne et ouvre la philosophie moderne du
sujet.
Je dis que je me sens
nécessairement amené, sitôt que je conçois une matière ou substance corporelle,
à la concevoir tout à la fois comme limitée et douée de telle ou telle figure,
grande ou petite par rapport à d’autres, occupant tel ou tel lieu à tel moment,
en mouvement ou immobile, en contact ou non avec un autre corps, simple ou
composée et, par aucun effort d’imagination, je ne puis la séparer de ces
conditions ; mais qu’elle doive être blanche ou rouge, amère ou douce,
sonore ou sourde, d’odeur agréable ou désagréable, je ne vois rien qui
contraigne mon esprit de l’appréhender nécessairement accompagnée de ces
conditions ; et, peut-être, n’était le secours des sens, le raisonnement
ni l’imagination ne les découvriraient jamais. Je pense donc que ces saveurs,
odeurs, couleurs, etc. eu égard au sujet dans lequel elles nous paraissent
résider, ne sont que de purs noms et n’ont leur siège que dans le corps
sensitif, de sorte qu’une fois le vivant supprimé, toutes ces qualités sont
détruites et annihilées ; mais comme nous leur avons donné des noms
particuliers et différents de ceux des qualités (accidenti) réelles et premières, nous voudrions croire qu’elles en
sont vraiment et réellement distinctes.
Galilée (1564-1642), L’Essayeur (1623), § 48.
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