mardi 5 mai 2015

Fiche 9 : Le travail et la technique (L, ES, S).

Analyse.

Le travail humain ne se passe pas de technique à tel point Marx, dans le livre I du Capital (1867) a repris la définition de Benjamin Franklin : l’homme est un « tool making animal ». Thomas d’Aquin, dans le De Regimine Principum (Du gouvernement royal), faisait déjà de la fabrication d’outils une caractéristique de l’homme vivant en société. Et Bergson dans l’Évolution créatrice définissait l’homme comme homo faber plutôt qu’homo sapiens.
Le travail est effort. Il est pénible. Son étymologie, si elle est juste, « tripalium » désignait l’instrument où l’on attachait les esclaves pour les torturer dans la Rome antique. Il vise toujours autre chose que lui-même. Si le travail humain use d’outils et de savoir-faire, c’est-à-dire de technique, il en est la source puisqu’il faut travailler pour faire l’outil. Mais à l’inverse, la pénibilité du travail, l’effort qu’il demande sera fonction, en apparence au moins, de la technique utilisée. Toujours est-il que l’effort apparaît premier puisqu’il faut acquérir la technique par l’exercice.
Dans la mesure où l’homme réalise ses besoins par le travail et la technique, ils semblent au fondement de toute culture, au sens anthropologique des pensées et conduites particulières à un groupe d’homme pendant un temps donné, voire au sens philosophique d’une formation de l’humanité par elle-même. Travail et technique permettent aux hommes non seulement de vivre, mais ils donnent une forme à sa vie. Par la division du travail, chacun trouve une place dans la société. Par la technique, les besoins sont satisfaits. Mais, ils s’accroissent et prennent une forme autre que la forme naturelle puisque l’homme a besoin des objets techniques et qu’il réalise ses besoins selon eux. Travail et technique rendent chacun toujours plus dépendant des autres tout en lui offrant une multiplicité d’usages qu’il ne pourrait avoir seul. En outre, la technique et le travail semblent libérer l’homme de la pression de la nature et lui permettre au contraire d’y imprimer sa marque tout en le dénaturant. Enfin, la technique est une dimension du savoir et du rapport au réel qui modèle le travail.
D’un autre côté, le rôle du travail, la place de la technique varient selon les cultures au sens anthropologique. Un même objet peut avoir des fonctions différentes selon les cultures. L’arc était un instrument religieux chez les anciens Tahitiens, une arme de guerre pour les Anglais du moyen âge, un instrument sportif de nos jours. Le travail peut être plus ou moins valorisé, plus ou moins intense, plus ou moins choisi. Le travail et la technique paraissent dépendre de la culture. Leur relative indépendance dans la culture occidentale peut être comprise comme relevant des spécificités de cette culture. Elle place en effet la technique, qu’elle distingue de plus en plus de l’art depuis le xviii° siècle (Diderot a vraisemblablement usé le premier du mot technique … au masculin dans l’expression « le technique de la peinture » en 1744, expression qu’on retrouve chez le peintre Jacques Nicolas Paillot de Montabert dans son Traité de la peinture de 1829), au fondement de la connaissance et de l’action.

Problème.

Le problème donc consiste à savoir quel est la véritable place du travail et de la technique dans la culture. S’agit-il du fondement du développement humain, voire de son histoire et de sa culture au sens philosophique d’une formation de soi de l’humanité ? S’agit-il au contraire d’une variable dont l’importance est propre à certaines cultures et qui pourrait donc être diminué au profit d’une tout autre idée de la culture moins activiste ?

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