Georges
de La Tour (1593-1652), La Madeleine aux
deux flammes, (~1640), huile sur toile, 133.4 × 102.2 cm, Metropolitan
Museum of Art, New York.
Analyse.
Notre
existence paraît essentiellement temporelle. Lorsque nous nous affirmons avec
certitude comme sujet parce que nier notre propre existence est impossible,
c’est dans l’instant même. Serai-je ? Rien n’est moins sûr. Les choses
quant à elles ne sont pas affectées par le temps. Le fleuve qui coule sous le
pont Mirabeau d’Apollinaire (1880-1918) ne se sent pas disparaître. Même les
vivants, les plantes, les animaux mêmes, semblent se cantonner au présent sans
en prendre véritablement conscience. Quant à Dieu, s’il est, il est par
définition éternel, c’est-à-dire hors du temps. Seul le sujet, c’est-à-dire l’être conscient et conscient de soi, existe
temporellement.
Or, le temps
paraît mystérieux. Fait d’un passé qui n’est plus, d’un avenir qui n’est pas
encore et d’un présent qui passe avant même d’être saisi, le temps paraît ne
pas être. Et pourtant, sa réalité ne fait aucun doute pour un être comme
l’homme dont la conscience de sa propre fin est tel qu’il s’est appelé
« mortel » dans la culture grecque.
Problèmes.
Le temps
est-il adossé à une existence non temporelle, autrement dit à l’éternité, qui
le rend possible ou bien a-t-il pour source le seul sujet ? Est-il la
substance même de toute réalité ? Est-il alors ce qui me fait toujours
devenir autre (« moi à cette heure,
et moi tantôt, sommes bien deux » Montaigne,
Essais, III, 9, De la vanité).
Le temps
est-il une modalité de notre existence parmi d’autres ou bien au contraire
est-il ce qui fait l’exister de l’existence qui se projette vers un avenir, se
rapporte à un passé ou se présente aux choses ? Est-ce ainsi qu’il faut
comprendre le sujet ? Autrement
dit, l’existence précède-t-elle le sujet ou le définit-elle comme l’être qui ne
coïncide jamais avec lui-même ou qui est toujours hors de lui-même, ce que
paraît signifier le « ex » ?
Ne faut-il pas
plutôt vivre au présent plutôt qu’exister, c’est-à-dire se perdre
irrémédiablement dans des temps qui ne sont pas nôtres (cf. Pascal, Pensées, Lafuma 47 ; Brunschvicg 172), voire qui n’existent
pas mais émanent du seul présent qui existe ? Que sont alors le passé et
le futur ? Comment vivre au présent s’il faut toujours se projeter et se
souvenir pour être un sujet et non un simple objet, voire un animal ?
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