René Magritte (1898-1967), La condition humaine (1933), huile sur toile, 100 × 81 cm, National Gallery of Art, Washington (États-Unis).
Analyse.
La perception s’entend au sens le plus
large comme une représentation immédiate. On peut, en ce sens, parler de la
perception d’une idée. C’est la conscience
immédiate qui fait la perception entendue ainsi.
La perception au sens étroit désigne la
saisie, par l’intermédiaire des sens (vue, ouïe, odorat, goût, toucher) d’un
objet singulier situé dans l’espace et le temps. Pour le sujet, c’est-à-dire l’être doué de conscience, elle se donne comme l’ouverture
même au réel dans sa dimension empirique. La perception apparaît comme la
condition de l’expérience. On dit
d’un objet perçu qu’il est concret alors qu’on dit de ce qui n’est que pensé
que c’est abstrait. La perception se dit aussi du résultat de l’acte de
percevoir. On qualifiera ainsi ce qu’on voit, touche, etc., c’est-à-à-dire
finalement la représentation de l’objet perçu. On peut pour les distinguer
utiliser le terme de percept.
L’objet perçu l’est par plusieurs sens,
parfois par un sens. La perception a lieu dans des endroits et à des moments
différents. La perception est donc une synthèse. Cette synthèse paraît passive
de sorte que la perception est une façon dont le réel se donne.
Or, les données des sens (couleurs,
formes, sons, qualités tactiles, goûts, parfums) sont indépendantes les unes
des autres. Elles comportent un aspect subjectif, c’est-à-dire qu’elles appartiennent
au seul sujet et non à l’objet.
Par contre, espace, temps, mouvement par
exemple, sont des qualités qu’on trouve dans chacune des données des sens.
Pour distinguer ces deux types de
qualités de la perception, Locke, dans l’Essai
philosophique concernant l’entendement humain (1690, livre II, chapitre 9,
§12-13), a nommé celles qui sont communes les qualités premières et celles qui
sont propres les qualités secondes en considérant que seules les qualités
premières constituent l’objectivité de la perception. Il systématise ainsi une
distinction qu’on trouve chez Galilée (1564-1642) dans l’Essayeur (1623, § 48) ou dans l’analyse du morceau de cire de
Descartes (Méditations métaphysiques,
méditation seconde).
Problèmes.
Dès lors, comment s’opère la synthèse
qu’est la perception ? Provient-elle d’une liaison entre les données des
sens qui s’opère dans le sujet malgré qu’il en ait, par les principes de
l’association des idées, contigüité dans l’espace ou le temps, ressemblance,
causalité (cf. Hume) ? Ou bien provient-elle d’un jugement de l’esprit de
sorte que la perception est toujours une opération intellectuelle (cf.
Descartes) ? Ou bien a-t-elle pour fondement un découpage du réel
qu’effectue le sujet sur la base des exigences de la pratique (cf. Bergson),
voire des habitudes de sa culture ou de son histoire (cf. Marx) ? C’est le
problème des conditions de possibilités de la perception.
Dans la mesure où la perception repose
sur les sens que possède l’homme, se pose aussi le problème de sa vérité.
Est-elle pour le sujet un aspect secondaire de son être lié à la présence d’un
corps, un dispositif purement vital qui lui permet de repérer plus ou moins
précisément ce qui utile ? Ou bien au contraire, la perception est-elle ce
qui fonde l’enracinement du sujet comme un être par et pour lequel un monde un
possible ? Est-elle une source de vérité, notamment par et grâce à
l’art ?
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