Rembrandt
(1606-1669), La leçon d’anatomie du
docteur Tulp (1632), 169.5 × 216.5 cm, Mauritshuis, La Haye (Pays-Bas)
Le
vivant présente des propriétés étonnantes. Il paraît capable de chercher hors
de lui ce qui est nécessaire pour se conserver comme le montrent les plantes.
Il se meut et perçoit la réalité extérieure. Il remplace lui-même ce qui lui manque
(cicatrisation par exemple). Il se reproduit. On peut alors penser que la
finalité, c’est-à-dire un comportement dirigé par la réalisation d’un but ou
d’une fin, lui appartient essentiellement. Reste à savoir comment.
On
peut expliquer le vivant par l’âme, antique notion, voire notion universelle.
L’expérience du cadavre, c’est-à-dire du corps sans vie, donne à penser qu’il y
a quelque chose dans le vivant qui est autre que la simple matière : c’est
ce que montre Aristote (Parties des
animaux, I). L’âme alors est-elle un principe tout autre que la matière qui
advient au corps vivant et qui s’en sépare (cf. Platon, Phèdre) ou bien est-ce ce que réalise la matière lorsqu’elle est
douée de vie de sorte que sans corps, l’âme n’a aucun sens (cf. Aristote, De l’âme, II) ? L’âme
n’implique-t-elle pas la conscience et ne doit-elle pas être réservée à l’homme
(cf. Descartes, Lettre au marquis de
Newcastle du 26 novembre 1646) ?
On
peut expliquer le vivant par le modèle de la machine. En effet, elle présente
une certaine autonomie et montre une finalité apparente. Un tel modèle permet
de rejeter dans les limbes de la connaissance préscientifique la notion d’âme.
Or, comme une machine suppose un ingénieur, un tel modèle ne réintroduit-il pas
une finalité externe, celle d’un Dieu créateur qui a disposé les vivants de
façon à ce qu’ils s’orientent dans le monde ?
On
peut penser le vivant comme rompant avec la matière dans sa dimension
physico-chimique. Alors que la matière inerte exige pour être connu des forces
qui agissent selon le principe de causalité, c’est-à-dire selon des relations
nécessaires et universelles entre des faits telles que certains en produisent
d’autres. On lui attribue alors une ou plusieurs forces vitales qui utilisent
la causalité physico-chimique pour maintenir la vie contre la mort. Alors que
l’âme poursuit telle ou telle fin, la force vitale n’a que la vie comme objet.
Admettre une ou plusieurs forces vitales, n’est-ce pas ouvrir la voie de la
théologie ? N’est-ce pas admettre ce qui ne peut en aucun cas donner lieu
à une expérience, donc à une connaissance scientifique du vivant ou bien
celle-ci oblige-t-elle à élargir la notion de science ?
On
peut enfin chercher des concepts proprement biologiques comme ceux de milieu
intérieur, d’évolution des espèces ou encore de programme génétique qui, sans
rompre avec les conditions physico-chimiques de la matière, rendent compte des
spécificités des vivants, y compris ce vivant qui cherche à connaître le
vivant : l’homme. Ne faut-il pas alors admettre que le vivant, y compris
l’homme, peut, en droit s’expliquer par les seules lois de la physique ?
N’est-on pas conduit à une position réductionniste, voire physicaliste ?
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